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Affaires

Low income banking : les clients affluent, la rentabilité reste hypothétique

Le concept de banque du pauvre lancé il y a moins de deux ans a attiré du monde : BCP compte 193 000 nouveaux clients et Attijariwafa bank parle de dizaines de milliers.
Une carte de retrait, un compte et des commissions réduites au maximum : les clients coûtent et ne rapportent rien pour le moment.
Des produits spécifiques de prêts immobiliers et d’assurance sont en gestation.

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Lancé il y a moins de deux ans, le Low income banking, ce concept de banque pour personnes à faible revenu ou à rentrées d’argent irrégulières, et communément appelé banque du pauvre, semble avoir du succès, alors que l’on était plutôt sceptique là-dessus au début. La Banque centrale populaire et Attijariwafa bank qui se sont lancées dans le créneau semblent aujourd’hui satisfaites de leurs réalisations respectives. Apparu en 2008, le Hissab Chaâbi de la Banque populaire connaît un franc succès, puisqu’en moins de deux ans il a réussi à séduire plus de 193 000 clients qui n’étaient pas encore bancarisés. «Ce produit dont la commercialisation se base sur le réseau bancaire classique est destiné à une clientèle essentiellement rurale, non bancarisée et dont les revenus mensuels ne dépassent pas les 3 000 DH par mois», explique-t-on auprès de la Banque centrale populaire (BCP).
Outre le Hissab Chaâbi, cette banque investit deux autres volets du low income banking. Lancé début 2009, le premier concerne la bancarisation des salariés et artisans, à faibles revenus et affiliés à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). «Nous avons réussi à bancariser, à fin 2009, 68 000 salariés qui recevaient leurs émoluments par des mises à disposition de sommes au niveau de la Poste ou au niveau d’une banque de la place. Actuellement, ces
68 000 nouveaux bancarisés reçoivent leurs prestations par virement bancaire et disposent d’une carte de retrait», souligne-t-on auprès de la BCP.

Les clients des associations de microcrédit également visés

L’autre volet concerne, quant à lui, les bénéficiaires des microcrédits que la banque veut également rendre clients réguliers. Pour ce faire, le management de la BCP s’est appuyé sur les bases de données des deux fondations que la banque contrôle aujourd’hui : celle de la Banque populaire (FBPMC) et Zakoura, qu’elle a acquis il y a un an. «Le produit bancaire pour les clients du microcrédit sera lancé sous peu. Notre objectif est d’arriver à 70 000 clients qui disposeront dans le cadre de ce produit d’un compte bancaire et d’une carte de retrait avec des frais de gestion réduits au maximum», prévoit-on auprès de la BCP.
En s’attaquant aux clients du micro-crédit, l’établissement bancaire concurrence-t-il les associations de micro-crédits ? Le management de la BCP écarte toute concurrence déloyale et affirme que l’offre s’apparente davantage à une bancarisation qu’à un financement en microcrédit. «Notre produit commence par une bancarisation simple comprenant un compte avec une carte bancaire», assure-t-on auprès de la BCP.
Du côté d’Attijariwafa bank, qui a lancé son produit Hissab Bikhir il y a tout juste un an, l’on affiche la même sérénité. Samira Khamlichi, DG de Wafacash, filiale du groupe, qui assure la commercialisation du produit pour AWB, souligne que «les réalisations du Hissab Bikhir, qui vient de fêter son premier anniversaire, sont conformes aux prévisions et aux études réalisées avant le lancement du projet». Mme Khamlichi qui n’hésite pas à mettre en avant les spécificités du Hissab Bikhir (voir encadré) indique, sans donner de chiffres précis, que «le premier bilan est largement positif et les clients se comptent en dizaines de milliers».

D’abord accompagner le client, ensuite profiter de l’amélioration de sa situation

La banque économique semble donc avoir du succès, mais avec un simple compte bancaire, une carte de retrait et des frais de tenue de compte réduit au minimum, qu’en est-il de la rentabilité pour des clients à la capacité d’épargne très faible, pour ne pas dire inexistante ? Les banquiers sondés confirment que les clients visés ne sont pas des sources de profit pour le moment. «Les clients du Hissab Chaâbi ne sont pas rentables à court terme. Il faut savoir que la rentabilité pour ce type de produit, certes très importante, ne constitue pas pour autant notre seul objectif», se justifie-t-on auprès de la BCP. En fait, l’effort d’investissement est d’abord réalisé dans le but de bancariser cette clientèle pour lui permettre d’améliorer ses conditions de vie.
«Une fois cet objectif atteint, la banque accompagne les clients dans leur vie personnelle et professionnelle en essayant de trouver des produits adaptés à leur situation. Et c’est à ce moment là qu’on peut parler de rentabilité», souligne un haut responsable de la BCP. D’ailleurs, la banque compte lancer dès ce mois (avril) un produit de financement immobilier pour les clients du Hissab Chaâbi. Même son de cloche du côté d’AWB qui insiste sur la priorité de la bancarisation sur la rentabilité pour ce type de produit, mais le groupe prépare également, à l’instar de la BCP, des produits annexes au Hissab Bikhir. «Nous allons renforcer notre offre dans les prochains mois par des produits et services qui répondent à leurs attentes et notamment une carte monétique, des prêts et des produits d’assurance adaptés à leurs besoins», tient à préciser Mme Khamlichi.