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Culture

Mimouni, le peintre-archéologue

Sous l’intitulé «Sillages», se tient, du 13 novembre au 6 décembre, à  la galerie Nadar, à  Casablanca, l’exposition de El Houssaïne Mimouni
L’occasion de découvrir un artiste peu connu, même si sa première exposition remonte à  1986.

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Malgré une présence sur la scène picturale de plus de vingt ans (sa première exposition remonte à 1986), El Houssaïne Mimouni demeure peu connu dans son pays. Ce qui ne surprend guère quand on sait que cet artiste multiple – il est tout uniment dessinateur, graveur et peintre – a choisi, après l’obtention d’une licence d’arts plastiques à l’université Paris VIII, de s’installer à Montpellier, où il enseigne et vit. Sollicité par de nombreuses galeries françaises, il a rarement fréquenté les cimaises marocaines, à l’exception notable de celles d’Asilah, ville où il a été convié à trois reprises, à l’occasion du moussem culturel.

Une métaphore de l’époque, déboussolée et ensanglantée
La galerie Nadar, revenue en force après une longue éclipse, a eu l’heureuse inspiration d’être l’hôte des œuvres de Mimouni. Une aubaine, tant cet artiste est singulier. Il avait caressé le rêve de devenir archéologue, mais il dut renoncer à sa vocation pour embrasser la lumière. Et comme on ne se défait pas facilement d’une obsession, l’archéologie hante ses toiles. Son œuvre, confirme l’écrivain Maâti Kabbal, «se laisse approcher par le biais de l’archéologie, convoquant les concepts de fouilles, aplats, niveaux, nivelés, débroussaillage, surfaces accidentées».
Archéologie encore, celle des sources, comme dirait Edmond Amran El Maleh. Longtemps éloigné de Taroudant, où il a vu le jour, Mimouni n’en reste pas moins obnubilé. Ce qui se traduit par son souci d’exhumation, puis de restitution de pans visuels de son enfance. La couleur, d’abord. Celle de la terre d’argile. Ensuite, le grain de sable déposé sur la toile. Enfin, les signes, les motifs et les talismans, qui ne sont pas sans rappeler Ahmed Cherkaoui, peintre qui a été le premier à puiser son inspiration dans l’artisanat marocain. Autant de créatures qui peuplent le monde de Mimouni. Dans les récents travaux de l’artiste, se donnent à voir des échelles appuyées au néant, des esquifs incertains et des barbelés lugubres. On peut y lire une métaphore de l’époque, vulnérable, déboussolée, tourmentée et ensanglantée.
Mais plutôt que se laisser tenter par des interprétations approximatives, il vaut mieux s’abandonner au plaisir d’écouter par les yeux la musique qui s’exhale de cette peinture tout en rythmes, cadences et airs, ainsi que le souligne Maâti Kabbal, qui compare l’œuvre de Mimouni à la musique flamenca de Camaron de la Isla.