Au Royaume
Pas tous dans le même panier
L’intérêt de la libéralisation est évident pour l’investissement : les gros investissements iront, de plus en plus, vers les régions constituées en zone de libre-échange plutôt que vers des marchés minuscules.
AU fur et à mesure que progresse le démantèlement tarifaire, les lobbies protectionnistes s’activent de plus en plus. C’est tout à fait naturel, attendu, et ils sont dans leur rôle. Simplement, il ne faut pas tomber dans le piège. Le gouvernement doit faire preuve de discernement et traiter les dossiers au cas par cas.
La première chose qu’il faut rappeler haut et fort, c’est que l’ouverture est dans l’intérêt du Maroc. Cela ne fait plus débat et il n’est pas nécessaire d’en refaire la démonstration. L’ouverture est donc la règle, la protection l’exception.
L’agriculture fait partie des exceptions recevables. Dans le monde entier, soit la filière agricole est protégée, soit elle bénéficie d’un traitement spécifique.
Nous savons que notre agriculture est en retard. Nous savons que les rendements sont faibles voire très faibles. Nous savons donc que quand on ouvre les frontières à certains produits, c’est le sort des fellahs qui est en jeu, in fine.
C’est pourquoi l’émoi marocain au sujet des importations de lait en poudre ou de sucre en provenance des Emirats est compréhensible. Mais il aurait été préférable, pour la crédibilité de l’action publique, pour la cohérence de la politique économique, d’anticiper ces problèmes plutôt que de les subir comme c’est le cas aujourd’hui.
Il en va autrement dans le domaine industriel. Les démantèlements sont annoncés et connus depuis des années. Ils ne sauraient être remis en question que dans des cas patents de concurrence déloyale ou dans les cas prévus par l’OMC. Poussés par des lobbyings efficaces, il se peut que l’on croie défendre les emplois ou l’industrie, alors qu’on défend en réalité la rente, les intérêts individuels ou catégoriels, l’absence de compétitivité et parfois la médiocrité. Dans le cas de la céramique, par exemple, on ne sait pas trop s’il y avait réellement sous-facturation et concurrence déloyale.
L’intérêt de la libéralisation des échanges n’est pas le commerce en soi. Celui-ci est de toutes les façons structurellement déficitaire. Non, l’intérêt réside d’abord chez le consommateur qui accède à un choix plus vaste ; ensuite chez l’industriel qui, déprotégé, devra se battre pour améliorer sa productivité et sa qualité finale ; et enfin et surtout au niveau de l’investissement. Les gros investissements iront, de plus en plus, vers les régions constituées en zone de libre-échange plutôt que vers des marchés minuscules. L’ouverture d’aujourd’hui, ce sont les investissements et l’emploi de demain.
