SUIVEZ-NOUS

Affaires

Polémique chez les architectes : L’accès à la profession bientôt conditionné par la réalisation de 2 ans de stage

Un stage qui sera sanctionné par un certificat permettant au stagiaire de solliciter l’autorisation d’exercer. Des architectes ne sont pas prêts à prendre en charge la rémunération des stagiaires. Ils proposent l’introduction d’un examen à la fin du stage et son introduction dans le cursus universitaire.

Publié le


Mis à jour le

Les articles 4 et 8 à 15 de la loi sur l’exercice de la profession d’architecte 16-89, devront bientôt être appliqués. Une requête du Conseil national de l’ordre des architectes a été déposée au Secrétariat général du gouvernement afin de mettre en œuvre ces obligations. Ces articles prévoient, entre autres, une durée de stage de 2 ans, qui sera sanctionnée par un certificat délivré par l’ordre des architectes sur rapport du maître de stage, pour permettre au stagiaire de solliciter l’autorisation d’exercer. En face, les architectes ou sociétés d’architectes sont tenus d’assurer la formation des stagiaires. Seuls peuvent assurer la formation des stagiaires, les professionnels exerçant à titre indépendant depuis 5 ans au moins. Tout cela est matérialisé par un contrat type qui établit les rapports entre l’architecte stagiaire et le maître de stage dans lequel on évoque une rémunération du stagiaire de 6 000 DH. Des professionnels du métier contactés sont unanimes sur la nécessité d’introduire cette pratique, non seulement de par son caractère obligatoire, puisqu’il s’agit d’une loi, mais surtout pour la valeur ajoutée qu’elle devra apporter au métier. Toutefois, ils réfutent plusieurs éléments compris dans cette obligation. Rachid Boufous, architecte urbaniste trouve que «la rémunération du stagiaire ne devrait pas être supportée par le cabinet d’architecte, mais par l’Etat, spécialement dans les conditions actuelles». Comme le secteur immobilier est en berne, plusieurs architectes ont vu leur activité se réduire, surtout ceux travaillant seulement avec le secteur privé ; prendre en charge au moins un stagiaire devrait alourdir encore plus les charges du cabinet, surtout que les architectes estiment que les rudiments du métier seront enseignés durant ces deux années de stage. «Les architectes qui accepteraient de prendre des stagiaires sous leurs ailes devraient les astreindre à effectuer des tâches multiples ou ingrates. Ce qui devra les éloigner de l’essence même du métier qui comprend en plus de l’architecture, les rapports avec l’administration et autres partenaires», ajoute un architecte. Cela, sans parler des magouilles dont la profession pourrait faire l’objet. Elle ne serait pas à l’abri d’un trafic dans les certificats délivrés, sans que le stagiaire n’ait rempli les termes de sa mission par exemple, ou même passé de stage… En effet, le stage est sanctionné seulement par un certificat délivré par le maître de stage, et non par un examen, contrairement aux autres professions libérales (avocats, notaires, experts comptables…). Du coup, seule l’appréciation de l’architecte professionnel fait foi des compétences du stagiaire.

S’il y a une autre contrainte que certains architectes souhaitent discuter avec le gouvernement, ce n’est pas le stage en soi ou encore sa durée, mais plutôt son intégration dans le cursus universitaire. M.Boufous signaleque  «pendant les deux dernières années d’études architecturales, presque plus aucune formation n’est dispensée, l’étudiant s’occupe exclusivement de son projet de fin d’année. Il serait plus intéressant d’intégrer ce stage pendant ces années, de sorte à ce que le stagiaire soit encadré par les professeurs eux-mêmes». Il ajoute : «A la fin du stage, un examen d’accès à la profession pourrait être mis en place et dont l’évaluation serait effectuée par une commission constituée du professeur, du maître de stage et d’un représentant du conseil de l’ordre». Ainsi, notre source prévoit une forte adhésion des architectes professionnels à cette pratique. Autrement, ils ne seront pas prêts à suivre. Cette proposition prend tout son sens lorsqu’on sait que les études d’architecture sont à composante majoritairement théorique et que l’apprentissage réel se fait sur le terrain. D’ailleurs, une réforme sérieuse des études en architecture au Maroc est fortement souhaitable en y intégrant aussi bien les dernières technologies et réglementations que le volet patrimonial. Quoi qu’il en soit, des discussions et réunions sont toujours en cours entre le conseil de l’ordre et les autres parties dont l’autorité de tutelle pour introduire des amendements afin de mettre en place des conditions d’admission et de pratique du métier win-win.

Notaires & avocats : La réforme de l’accès à la profession toujours en attente

L’architecture n’est pas le seul métier qui impose des années de stage. Certaines professions libérales dont les avocats et notaires, répondent à la même formule. Pour pouvoir exercer, aussi bien le notaire que l’avocat devront passer un stage auprès de professionnels du métier. Seulement, après l’obtention d’une licence en droit, le notaire doit réaliser un stage dans un cabinet de notaire, suivi d’un examen de commis. Une fois réussi, un stage de trois ans est exigé, qui est également sanctionné par un examen et s’il est réussi, le notaire doit attendre que sa mission soit validée par un comité ad hoc composé de représentants de plusieurs ministères. Cela dit, depuis la réforme de la loi en 2012, instituant la création de l’institut de formation des notaires dont le décret tarde à voir le jour, aucun concours d’accès n’a été organisé. Une refonte des conditions d’accès à la profession est prévue dès la publication de ce décret. Idem pour les avocats qui attendent également la création d’un institut de formation qui introduira plusieurs changements dans l’accès à la profession. Entre-temps, les conditions d’admissibilité reposent sur une licence en droit privé, talonné par un examen dit CAPA pour l’obtention du certificat d’aptitude à la profession d’avocat. Une fois cette étape franchie, il faut effectuer un stage de 3 ans dans un cabinet d’avocat qui a au moins 5 ans d’ancienneté.