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Culture

L’odyssée du RA II…, 50 ans après

• Safi commémore la date anniversaire de cette extraordinaire aventure.
• Le 17 mai 1970 l’explorateur Thor Heyerdahl et ses coéquipiers se lancent le défi de traverser l’Atlantique à bord d’un bateau en Papyrus.
• Le savant norvégien désirait prouver au monde que les Egyptiens avaient découvert l’Amérique bien avant Christophe Colomb.
• Madani Ait Ouhanni, équipier marocain de cette odyssée, relate les moments forts de cette traversée historique.
• Un périple hors du commun…

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RA II

Cinq décennies après la fabuleuse odyssée du RA II, la ville de Safi continue à se remémorer ce périple maritime hors du commun. La cité a commémoré de nouveau il y a quelques jours cette date marquante de l’histoire de la ville. Elle a rendu hommage à l’initiateur de cette épopée, l’explorateur Thor Heyerdahl et ses coéquipiers. La commémoration initiée par l’ambassade de Norvège, les associations Mémoire de Safi et la Fondation de Safi, le groupe OCP et le groupe Barid-Al Maghrib, a été marquée par de vibrants honneurs à l’égard à Hadj Madani Ait Ouhanni qui avait pris part à cette odyssée. La cérémonie organisée à la Cité des Arts et de la Culture de Safi a été l’occasion pour Barid Al-Maghrib d’émettre un timbre poste en souvenir de cette expédition scientifique.
Le choix de ces célébrations en ce mois de mai n’est pas fortuit. Cette extraordinaire aventure a commencé en mai 1970. «Nous avons pris la mer le 17 mai 1970. A bord, chacun avait sa tâche et mon rôle était d’étudier la pollution de surface de l’Atlantique», raconte Madani Aït Ouhanni. Sa participation à l’expédition a été un concours de circonstances. L’équipage du RA II séjournait à l’hôtel Marhaba Safi, dont il était à l’époque directeur. Un des membres de l’expédition a eu un empêchement et le Dr Thor Heyerdahl, organisateur du voyage, lui a alors proposé de le remplacer. Sans hésiter, M. Ait Ouhanni dit avoir accepté, car il souhaitait que le Maroc soit partie prenante de cette singulière opération qui réunissait différentes nationalités.
Rappelons qu’à travers cette curieuse expédition le savant norvégien Thor Heyerdahl désirait prouver au monde que les Egyptiens avaient découvert l’Amérique bien avant Christophe Colomb. Pour ce voyage, un bateau en Papyrus, selon la pure tradition de l’Egypte antique, fut construit au Maroc par des pêcheurs boliviens. Sous la bannière de l’ONU, le radeau les a menés de Safi à Bridgestone en Barbade (Antilles). L’équipage du RA II naviguera durant 57 jours pour parcourir 3 200 miles marins (6 400 km). Le 12 juillet 1970, il fut à destination, où un vibrant et chaleureux accueil lui fut réservé par la population, le gouvernement de l’île, ainsi que la presse internationale. M. Ait Ouhanni raconte cette atmosphère avec beaucoup d’émotion et de fierté : «Les congratulations affluaient de partout. Feu S.M. Hassan II a adressé au chef de l’expédition la lettre suivante : “Le périple que vous avez effectué, à travers l’Océan Atlantique, reliant les continents africain et américain et tissant ainsi entre eux un lien supplémentaire, renouvelant peut-être l’action d’intrépides prédécesseurs, constitue pour nous, et à plus d’un titre, un motif de fierté et une cause d’admiration. En tant que Marocain, nous sommes heureux d’avoir pu assister à vos préparatifs, d’avoir encouragé votre initiative, de vous avoir permis de réaliser votre ambition à partir de nos côtes et d’avoir manifesté notre confiance à votre projet et notre joie à votre succès, en associant un de nos concitoyens à votre entreprise…“.» De ce périple, Madani Ait Ouhanni, relate aussi moult détails. Son récit sur la traversée est semé d’anecdotes. Il raconte ainsi comment il a eu dès les premières heures de navigation, le mal de mer, car originaire de Marrakech, il n’avait pas le pied marin. Mais très vite, il s’acclimatera aux conditions du bateau. «Une nuit, nous avons vu un gros pétrolier se diriger droit sur nous, alors que j’étais de quart avec mon coéquipier égyptien. Nous avons alors illuminé les voiles avec nos torches pour lui signaler notre présence et éviter le pire. Le navire a dévié juste à temps», raconte M. Ait Ouhanni. Il se souvient très bien aussi comment l’équipage avait dû rationner l’eau à raison d’un 1/2 litre par personne et par jour, car plusieurs jarres s’étaient cassées lors de la première tempête. Autant de moments forts et bien d’autres gravés dans l’esprit de l’équipier marocain du RA II. Cinquante ans après cette traversée, il souligne que cette aventure a été un événement marquant de sa vie et lui a enseigné des valeurs telles que la solidarité et la modestie.
M. Ait Ouhanni rappelle aussi qu’il a réalisé à l’issue de l’expédition un rapport scientifique qui se trouve dans les rayons de la bibliothèque de l’ONU. Il continuera à partager les péripéties de l’aventure du RA II en devenant délégué de Connaissance du monde. C’est ainsi qu’il a effectué une tournée non seulement au Maroc et à travers 15 pays africains mais aussi en France, en Belgique et à New York.
Aujourd’hui à 81 ans, Hadj Madani Ait Ouhanni est le dernier témoin vivant parmi les huit hommes ayant participé à l’expédition du RAII. Pour sa part l’explorateur et organisateur de l’expédition Thor Heyerdahl, nous a quittés en 2002. Outre ses talents de grand navigateur, il a été aussi archéologue et un grand humaniste. Membre de l’Académie des sciences de Norvège, membre de l’Académie des sciences de New York et titulaire de la médaille d’or de la Royale Geographic de Londres, il fut maintes fois distingué. Un prix international maritime Thor Heyerdahl pour l’environnement fut institué en Norvège en 2001.