Affaires
La recette du patronat pour protéger l’appareil productif
• Sur les 508 mesures du plan de relance remis à l’Exécutif, plusieurs touchent directement à la TVA, à l’IS, et aux charges sociales.
• La CGEM propose de soutenir la demande avec 10 milliards de DH à travers la réduction de la TVA de 20% à 10% ou le financement du chômage partiel.
• Pour intégrer l’informel et réduire les écarts de compétitivité avec les opérateurs transparents, il est proposé la mise en place d’une TVA à 10% concernant les produits fortement concurrencés.
Le plan de choc du patronat pour la relance vient d’être remis à l’Exécutif dans la perspective de l’élaboration imminente de la Loi de finances rectificative. L’objectif, à travers les 508 mesures du plan, est d’éviter la récession et préserver l’appareil productif de la panne sèche. Pour la préparation de ce plan de relance, Chakib Alj, président de la CGEM, affirme que la confédération a mobilisé toutes ses composantes et fédérations pendant trois semaines. «Les travaux de 25 fédérations ont abouti à un plan qui se veut ambitieux, intégré, cohérent et équilibré entre l’Etat, le secteur privé et le citoyen», affirme le président de la Confédération patronale.
Dans le détail, le plan du patronat s’articule autour de l’intégration de l’informel, la simplification des relations entre l’Etat et l’entreprise, l’inclusion financière des opérateurs et le règlement du dossier des délais de paiement. Pour concrétiser l’ensemble des mesures proposées, Mehdi Tazi, vice-président de la CGEM, évoque une enveloppe de 80 à 100 milliards de DH sur une période de 12 mois, à partir de juillet 2020. Les 10 milliards de DH serviront à la subvention des entreprises en difficulté, soit sous forme de financement du chômage partiel, si la mesure est acceptée, soit sous forme de support de la demande à travers la réduction de la TVA de 20% à 10% ; 60 milliards de DH vont servir à la garantie accordée dans le cadre de Damane Relance; 10 milliards de DH seront consacrés à la capitalisation des entreprises publiques afin d’apurer leurs dettes envers leurs fournisseurs ; et enfin 20 milliards de DH seront alloués à la création d’un fonds d’investissement sectoriel pour supporter certains secteurs en proie à des difficultés nées de la crise pandémique.
Parmi les propositions du plan, il existe des actions qui concernent l’offre et la demande et d’autres transverses qui concernent les problématiques structurelles du tissu économique, notamment des mesures fiscales proposées par la Confédération patronale pour l’après-crise. Objectif : permettre aux entreprises une convalescence rapide et un retour accéléré à la productivité et la création de valeur en protégeant leur compétitivité.
Pour Abdelmejid Faiz, vice-président de la Commission fiscalité et douane de la CGEM, les mesures fiscales proposées par le patronat suivent les phases de l’évolution des réponses des autorités à la crise. A commencer par les mesures fiscales adoptées par le Comité de veille économique dans ses premières réunions et qui sont valables jusqu’au 30 juin. Il s’agit principalement de la déductibilité des cotisations versées par les entreprises au Fonds spécial Covid-19 et leur étalement sur une période de 5 ans. Aussi, la CGEM demande de prévoir les traitements comptables imposés par la pandémie dans la loi, en l’occurrence le cadre réservé aux amortissements et à certaines charges. «Nous avons demandé à ce que ces mesures soient consacrées par voie législative dans le Code général des impôts pour qu’il y ait un alignement sur le plan fiscal», explique M.Faiz.
Sur le plan des échéances fiscales, le patronat propose un report jusqu’au 30 juin sans pénalités ni intérêts de retard. Deux demandes ont été formulées dans ce sens. D’une part, reporter les échéances au-delà du 30 juin sans pénalités avec étalement et, d’autre part, consacrer le report par voie légale dans le CGI pour éviter le traitement au cas par cas.
Par ailleurs, la CGEM a demandé d’inscrire les remboursements et restitutions de TVA dans les dépenses du Budget de l’Etat. L’objectif est de garantir des ressources suffisantes pour pouvoir rembourser les entreprises à temps et ainsi alléger la pression sur les trésoreries.
Au volet de l’IS, le patronat a proposé dans sa batterie de mesures fiscales qui viennent d’être adressées au ministère de l’économie et des finances, une augmentation de la ligne pour tout ce qui est exemption des acomptes de l’impôt sur les sociétés. Il est également demandé à l’Exécutif de reporter les délais de régularisation au 30 septembre avec ajustement des mécanismes de mise en œuvre de ces régularisations.
Enfin, en matière de fiscalité locale, les responsables de la CGEM jugent les taxes et impôts locaux peu pertinents d’un point de vue économique parce que dé-corrélés de l’activité. Par conséquent, le plan de relance propose un traitement exceptionnel des taxes dues au titre de 2020 et un accompagnement pour l’année 2021.
Parmi les grands axes du programme de relance proposé au Comité de veille économique (CVE), l’intégration de l’informel figure en tête des priorités. Les mesures qui ont trait à ce secteur s’articulent autour de trois axes. Premièrement, la réduction des écarts de compétitivité avec le secteur formel par l’introduction d’une TVA à 10% sur 18 mois concernant les produits fortement concurrencés par l’informel et par le renforcement des mesures douanières au niveau des secteurs les plus touchés par la concurrence déloyale de l’informel. En deuxième lieu, l’inclusion des entreprises informelles et des salariés qui en dépendent avec la mise en place d’un statut fiscal et social particulier de type auto-entrepreneur et la création d’un statut spécifique au niveau de la CNSS pour intégrer les salariés. Un statut de microentreprises est proposé et bénéficiera d’un impôt unique et d’un statut spécial auprès de la CNSS pour les obligations sociales. Et enfin, le renforcement de certaines règles de transparence telle la généralisation de l’Identifiant commun de l’entreprise (ICE) et la mise en place de mesures plus sévères contre la contrebande et la sous-facturation à l’importation.
Pour M.Alj, le moment est venu d’intégrer les agents économiques de ce secteur dans l’économie formelle de façon plus efficace pour qu’ils ne trouvent plus aucune raison d’être dans l’informel.
