SUIVEZ-NOUS

Affaires

Les créances en souffrance toujours en aggravation

Les créances compromises se sont inscrites en hausse de 7,2% après une progression de 2,5% en 2018. Les secteurs des industries manufacturières, du BTP, de l’hôtellerie et du commerce sont les plus touchés. A l’origine, une économie en berne et la dégradation de la situation des entreprises.

Publié le


Mis à jour le

créances en souffrance

Les créances en souffrance continuent d’augmenter. Après une aggravation de 2,5% à fin 2018, le stock s’est encore une fois alourdi, pour atteindre à fin novembre 2019, près de 70 milliards de DH, soit une hausse de 7,2%. Avec un encours du crédit bancaire qui se situe à 892 milliards de DH, ce sont ainsi 7,8% de crédits qui sont risqués. Rappelons que l’évolution de ces créances était sur une tendance baissière les trois dernières années, avec 6,8% en 2016, 3,7% en 2017 et 2,5% en 2018. L’on pourrait lier la hausse des impayés à une progression de l’encours des crédits bancaires. Or, ce n’est pas le cas, puisque ce dernier n’a augmenté que de 2,5%. «Une situation qui reste inquiétante comparée à la moyenne mondiale qui ne dépasse pas 4%. Toutefois, ce taux moyen de 7,8% reste stable à travers les années», nuance un banquier.

L’encours des impayés des entreprises non financières s’est alourdi de 1,6% à près de 40 milliards de DH, soit plus de la moitié du stock global des créances en souffrance et 11% de l’encours global des crédits accordés à ce secteur institutionnel. Les secteurs d’activité les plus touchés restent les industries manufacturières, suivies du BTP (immobilier compris), du commerce et l’hôtellerie. «Ce sont les secteurs les plus frappés par la lenteur des délais de paiement. Ajouter à cela, le ralentissement continu de la croissance économique, les conditions de paiement des opérateurs se resserrent», explique notre banquier. Plusieurs entrepreneurs sont donc dans l’incapacité de générer les ressources suffisantes afin d’honorer leurs engagements. D’ailleurs, un opérateur du BTP se désole : «Plusieurs efforts ont été consentis par les administrations publiques pour améliorer leurs délais de paiement, mais les dettes se sont tellement accumulées que ces efforts ne sont pas suffisants. Nombre de sociétés de taille petite et moyenne sont menacées de mettre la clé sous la porte, par manque de ressources». Cette montée des créances en souffrance pèse lourdement sur les politiques de distribution des crédits de l’ensemble des établissements de la place. D’où le ralentissement de l’évolution de l’encours global. Pour rappel, Fitch rating a déjà émis une alerte sur le niveau atteint au cours des deux dernières années.

Evolution des créances en souffrance depuis 2015

Evolution des créances en souffrance depuis 2015

De leur côté, les ménages ont creusé leurs impayés de 15,7%, atteignant du coup 30 milliards de DH, à fin novembre de l’année dernière, après une hausse de 2,7% en 2018, de 9,7% en 2017 et une baisse de 3,6% en 2016. Par rapport à l’encours des crédits distribués à cette clientèle, les créances en souffrance des ménages représentent 9,8%. Là encore, le taux des impayés a progressé plus rapidement que l’encours des crédits qui, eux, ont augmenté, pour s’établir à plus de 300 milliards de DH. A l’origine de cette situation, un resserrement des conditions de financement bancaire envers les particuliers, surtout relatifs à l’acquisition de biens immobiliers. D’ailleurs, l’encours de ce secteur ne s’est amélioré que de 2,5% à 221 milliards de DH. Fini le temps où les banques distribuaient des prêts à tout va, dépassant même le montant du bien immobilier.

Il faut noter aussi la décélération de la demande interne qui se matérialise, entre autres, par le tassement de l’encours des crédits à la consommation. En effet, il s’est accru de 4,4% à 56 milliards de DH, contre une hausse de 6,1% en 2018 et de près de 5% en 2017.

Même si le taux des créances en souffrance est en aggravation, il n’a pas pointé à des niveaux alarmants, surtout après le stress test effectué récemment par Bank Al-Maghrib et qui montre que le secteur bancaire reste résilient. Dans le cas d’une catastrophe, le taux de sinistralité devra se dégrader, pour se propulser à 8,7 % en 2019 et 13,4 % en 2020. Cependant, les provisions constituées par les banques devaient leur permettre de faire face à ce scénario extrême. Dans ce contexte, les banques poursuivent leur politique en matière d’octroi de prêts bancaires, en durcissant leurs conditions de financement. Cependant, cela reste insuffisant au regard d’une relance économique qui ne s’est toujours pas manifestée.