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Affaires

«L’article 9 est un mauvais signal envoyé aux entrepreneurs»

Nous croyons en l’entreprise marocaine, quels que soient sa taille ou son secteur d’activité. L’heure n’est pas à la perte de temps, mais à la mobilisation générale pour relancer le développement économique de notre pays. Les dispositions fiscales de la Loi de finances 2020 vont globalement dans le bon sens, mais le rythme des mesures est trop lent.

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Chakib Alaj, CGEM

Quels seront vos premiers chantiers que vous attaquerez en priorité ?
Sans attendre, nous avons engagé un processus de concertation avec toutes les fédérations et les régions afin de partager notre vision et de co-construire notre programme 2020-2023.
Le mot d’ordre est de redonner confiance à nos entreprises et à nos entrepreneurs, pour que l’investissement privé redémarre. Autre sujet majeur, la place à donner aux Régions, dans le cadre de la régionalisation avancée voulue par le Souverain, est intimement liée à l’émergence du Royaume. Il ne peut pas y avoir de croissance de nos entreprises sans développement des territoires dans lesquels elles sont implantées. Nous préciserons les chantiers urgents à déployer en concertation avec les parties prenantes, en particulier les ministères de l’intérieur, des finances, et de l’industrie et du commerce.

Est-ce que les dispositions fiscales de la Loi de finances 2020 vous paraissent satisfaisantes ?
Sur les 10 principales recommandations que la CGEM a proposées pour le PLF 2020, 8 ont été prises en considération, parfois partiellement, dans la Loi de finances définitivement adoptée. La neutralité fiscale relative aux transferts de titres intra-groupe, la diminution de la cotisation minimale et sa suppression pour les entreprises à cash-flow négatif 2ans de suite, l’encouragement de l’investissement dans les start-up par le crédit d’impôts, sont des mesures que la CGEM défendait et qui ont été effectivement adoptées.
D’autres mesures, en revanche, auraient mérité une position plus tranchée du gouvernement. La limitation de la baisse de l’IS à 28%, et cantonnée aux entreprises industrielles de moins de 100 MDH, n’est pas suffisante. Nous aurions préféré l’étendre à l’ensemble des sociétés pour baisser la pression fiscale sur toutes les entreprises opérant dans le formel, et élargir l’assiette des sociétés imposables.
Enfin, l’article 9 est de notre point de vue un mauvais signal envoyé aux entrepreneurs. Son adoption ne va pas dans le sens du retour de la confiance. Pour quelle raison voulez-vous qu’un opérateur privé ne puisse pas opposer un jugement contre une entreprise publique ? Quel recours lui reste-t-il ?
Les dispositions fiscales de la Loi de finances 2020 vont globalement dans le bon sens, mais le rythme des mesures est trop lent. Le temps ne joue pas en notre faveur. Il y a une urgence sociale et une urgence économique qui n’attendront pas 5 ans.

Est-ce que la CGEM est aujourd’hui en position de peser sur les orientations des politiques publiques notamment celles relatives à l’investissement et l’entreprise ?
La CGEM est l’institution qui représente le secteur privé depuis plus de 70 ans. Elle regroupe les principales fédérations sectorielles: 33 d’entre elles siègent au conseil d’administration, et est présente dans toutes les régions du Royaume. La CGEM est aussi représentée dans les conseils d’administration des principales institutions du pays.
De ce fait, bien entendu, sa voix est entendue et elle pèse sur les orientations de l’Etat en matière de politique publique et d’investissement.
La CGEM doit être forte, indépendante, mais se positionner en partenaire de l’Etat et poursuivre le même objectif de développement du pays. L’heure n’est pas à la perte de temps, mais à la mobilisation générale pour relancer le développement économique de notre pays. C’est l’entreprise qui crée la richesse, et c’est l’entreprise qui crée les emplois. Des entreprises prospères, c’est la garantie du succès de tous: Entreprise, Citoyen et Etat et de la paix sociale.

Comment comptez-vous assurer un équilibre au sein de la CGEM entre les grandes entreprises et les TPME qui n’ont pas les mêmes attentes ni les mêmes priorités ?
Nous croyons en l’entreprise marocaine, quels que soient sa taille ou son secteur d’activité. La CGEM est là pour défendre les intérêts communs de tous.
Nous devons veiller à avoir une représentativité des entreprises de toutes tailles, mais également de toute région dans les instances de la confédération. Les attentes des PME ne sont certes pas celles des grands groupes. Les PME sont plus sensibles aux problématiques de financement et de délais de paiement. Les grandes entreprises sont plus attachées à la défense de leur compétitivité (ALE, informel, etc.). Ces sujets ne sont pas antinomiques, nous devons tous les porter. Il y a, par ailleurs, davantage de synergies à développer entre les grandes entreprises et les PME-TPE, par exemple pour pénétrer les marchés internationaux.
Nous devrons donc remettre la CGEM au service de tous et nous atteler à restaurer la confiance entre les entreprises et l’Etat, entre l’Administration et la CGEM, et entre les opérateurs économiques eux-mêmes.