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Assurance : la hausse généralisée des tarifs est déjà appliquée
Les compagnies commencent à répercuter sur les assurés la prime complémentaire émanant de l’élargissement des contrats à la couverture contre les conséquences des catastrophes naturelles. La prime est déjà paramétrée dans les systèmes d’information des réseaux de distribution. Une taxe de solidarité contre les évènements catastrophiques de 1% des primes collectées du secteur instituée pour indemniser les populations non assurées.

Souscrire un contrat d’assurance coûte plus cher. L’augmentation des tarifs de l’assurance déjà appliquée par toutes les compagnies pour les souscripteurs des contrats à effet du 1er janvier 2020 est justifiée par le fait qu’à compter de cette date, les polices d’assurances seront étendues pour couvrir les conséquences de catastrophes naturelles de manière obligatoire en vertu de la loi 110-14.
Une tournée sur une dizaine de courtiers et de bureaux directs laisse voir que la prime d’assurance complémentaire applicable aux contrats d’assurance, qui devait être fixée avant le 31 décembre avec mise en œuvre effective le 1er janvier 2020 par arrêté du ministre des finances, est déjà paramétrée au niveau des logiciels de vente des réseaux de distribution (courtiers, agents et points de vente de la bancassurance).
Pour l’assurance automobile dont les primes pèsent plus de 40% du marché, deux modules ont été ajoutés à l’interface utilisée des courtiers en l’occurrence «Catastrophes naturelles liées à la garantie RC du véhicule» et «Catastrophes naturelles liées au garanties optionnelles». Selon notre consultation de plusieurs logiciels du marché, la prime globale est calculée en tenant compte de ces deux garanties.
Bien qu’elle concerne les contrats souscrits ou renouvelés à compter de janvier 2020, les assurés habitués à se rendre chez leurs courtiers pour renouveler d’avance leur police ont dû payer plus ou, dans les meilleurs des cas, acquitter le même prix s’ils méritaient bénéficier de baisse de primes pour leur bon profil routier (pas d’accidents avec rôle fautif).
Dans le détail, le législateur a imposé, par le biais des textes et arrêtés de la loi 110-14, que certaines polices d’assurances intègrent de manière automatique et obligatoire la garantie contre les conséquences d’événements catastrophiques.
Il s’agit des contrats d’assurance garantissant les dommages aux biens. Aussi, seront concernés les contrats d’assurance couvrant la responsabilité civile en raison des dommages corporels ou matériels causés à des tiers par un véhicule terrestre à moteur, prévue à l’article 120 de la loi 17-99 portant Code des Assurances dans son article 120 (responsabilité civile automobile). Enfin, l’élargissement de la couverture touchera aussi les contrats d’assurance, autres que les deux premiers, et qui couvrent la responsabilité civile en raison des dommages corporels causés aux tiers, autres que les préposés de l’assuré, se trouvant dans les locaux prévus aux contrats précités.
«L’ensemble de ces contrats d’assurances est donc soumis à un taux de prime complémentaire correspondant à l’élargissement obligatoire de la police à la couverture des conséquences d’événements catastrophiques», résument nos sources dans le secteur.
Auprès des opérateurs, l’on explique que cette obligation qui concerne donc l’ensemble des assurés qui ont une assurance garantissant les dommages aux biens, la RC automobile ou la RC pour les dommages corporels, vise à permettre aux citoyens et aux agents économiques, personnes physiques ou morales, de faire face aux conséquences d’événements violents et imprévisibles tels que les tremblements de terre, les crues, les inondations, les tsunamis et l’action violente de l’homme constituant un acte terroriste, une émeute ou un mouvement populaire. Par cette inclusion obligatoire, le législateur vise à couvrir un maximum de personnes (physiques et morales) au titre des conséquences de ces événements catastrophiques, notamment les dégâts corporels et/ou matériels pour eux et leurs ayants droit.
Quid alors du reste des personnes qui n’ont à la base aucune police d’assurance ? Pour cette population, le cadre légal nouvellement finalisé a prévu un régime spécial de prise en charge des personnes non couvertes par les polices d’assurances. Dans son article 15, la loi 110-14 a institué un «Fonds de solidarité contre les événements catastrophiques», une personne morale de droit public, placée sous la tutelle de l’Etat et dotée de l’autonomie financière.
Soumis au contrôle financier de l’Etat applicable aux entreprises publiques, le Fonds de solidarité a pour objet, entre autres, d’indemniser les victimes d’événements catastrophiques lorsqu’elles ne sont pas couvertes par un contrat d’assurance couvrant les conséquences dudit événement catastrophique. Le Fonds de solidarité sera financé par une taxe parafiscale dite Taxe de solidarité contre les évènements catastrophiques. A en croire nos sources, le taux de la taxe, fixé par décret du chef de gouvernement à 1% des primes, surprimes ou cotisations versées au titre des contrats d’assurances est applicable à toutes les opérations d’assurances à l’exception de l’assurance Accidents du travail (AT), des contrats d’assurances sur la vie ou de rentes viagères souscrits par des personnes n’ayant au Maroc ni domicile ni résidence habituelle et aux contrats relatifs à un risque situé à l’étranger ou se rapportant à un établissement industriel, commercial ou agricole situé à l’étranger.
Un dispositif légal de reconnaissance de l’événement catastrophique très encadré
Fortement encadrée et réglementée, la notion de catastrophe naturelle est actée par une «déclaration de la survenance de l’événement catastrophique» qui est établie, après avis de la Commission de suivi des événements catastrophiques telle qu’instituée par l’article 9 de la loi 110-14. La Déclaration se traduit par un acte administratif précisant, notamment, les zones sinistrées, la datation et la durée de l’événement catastrophique et publié au Bulletin officiel dans un délai qui ne peut excéder trois mois à compter de la date de ladite survenance.
La publication de l’acte administratif a pour effet exclusif de déclencher l’opération d’inscription des victimes sur le registre de recensement tel que prévu par la loi. Aussi, il est un préalable pour la mise en œuvre de la garantie contre les conséquences d’événements catastrophiques. Et, enfin, l’acte administratif déclenche le processus d’octroi des indemnités par le Fonds de solidarité contre les événements catastrophiques institué en vertu de l’article 15 de la nouvelle loi.
Même la définition de l’événement déclencheur a été très délimitée.
Des termes de la loi 110-14, est considéré comme événement catastrophique tout fait générateur de dommages directs survenus au Maroc, ayant pour origine déterminante l’action d’intensité anormale d’un agent naturel ou l’action violente de l’Homme. L’action d’intensité anormale d’un agent naturel constitue un événement catastrophique dès lors que le fait générateur est soudain et imprévisible; et que ses effets dévastateurs sont d’une intensité grave pour la collectivité.
L’action violente de l’homme est considérée comme un événement catastrophique quand elle constitue un acte de terrorisme ; ou est la conséquence directe de la survenance d’émeutes ou de mouvements populaires, lorsque les effets sont d’une intensité grave pour la collectivité.
Les dommages provoqués directement par les actions et mesures de secours, de sauvetage et de sécurisation sont assimilés à ceux résultant de l’événement catastrophique lorsque lesdites actions et mesures sont liées à cet événement.
Le législateur a, néanmoins, exclu du champ d’application du régime les dommages ou préjudices occasionnés par l’utilisation d’agents ou d’armes chimiques, biologiques, bactériologiques, radioactifs ou nucléaires ; la guerre civile, la guerre étrangère ou les actes d’hostilité assimilables, que la guerre soit ou non déclarée ; et les actes de cybercriminalité.
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[tab title= »Le cadre légal finalisé en 2019 par le modèle de recensement des victimes » id= » »]Il a fallu attendre plus de trois ans pour que la législation sur les catastrophes naturelles prenne le chemin de l’application. En effet, le texte en langue arabe a été publié dans l’édition générale du Bulletin officiel n°6502 du 30 hija 1437 le 22 septembre 2016. Il attendait, depuis, la publication de l’arsenal réglementaire des textes d’application devant régir les dispositions de la loi 110-14.
Cette dernière institue un régime de couverture des conséquences d’événements catastrophiques qui modifie et complète la loi n° 17-99 portant code des assurances. L’année 2019 a vu la publication du décret d’application (Décret N°2-18-785) par le chef de gouvernement le 29 avril 2019 et l’arrêté du ministre de l’intérieur (Arrêté N° 900-19) du 30 avril 2019 fixant le modèle du registre de recensement des victimes d’évènement catastrophique et les modalités d’inscription des victimes au dit registre.[/tab]
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