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Et lors des élections ?

Pour Mounia Bennani-Chraïbi, professeur à  l’Institut d’études politiques et internationales de l’Université de Lausanne, la famille joue un rôle pendant les élections.

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Pour Mounia Bennani-Chraïbi, professeur à l’Institut d’études politiques et internationales de l’Université de Lausanne, la famille joue un rôle pendant les élections.
« Rappelons que c’est l’une des premières instances de socialisation politique, au Maroc et ailleurs. Elle est, toutefois, loin de constituer le seul vecteur de socialisation. A titre d’exemple, il arrive que, dans la même famille, le frère aîné soit de gauche, alors que son benjamin est islamiste. A un autre niveau, un candidat peut bénéficier d’un soutien réel des membres de sa famille nucléaire ou étendue. Mais, il arrive aussi que des personnes de sa famille soutiennent l’un de ses rivaux. Nous sommes très loin d’une emprise totale des liens du sang.
Cela dit, on ne peut pas non plus dire que les réseaux familiaux court-circuitent les partis politiques. D’après les recherches que nous avons effectuées pendant les législatives 2002(*), s’il nous est clairement apparu que des partis se distinguent par une idéologie, par une “marque”, nous avons également observé que les ressorts de la mobilisation et de l’identification électorales sont multiples et non exclusifs. Prenons le cas d’une organisation militante durant la campagne électorale. Ses candidats puiseront dans le réservoir de militants et de sympathisants du parti, mais ils ne se priveront en aucun cas du recours aux réseaux de proximité et de clientèle.
En fait, c’est un mythe que de croire que les partis ont vocation à encadrer la population de manière désincarnée, uniquement sur la base du discours, de l’idéologie ou du programme. Y compris dans les démocraties fondatrices, l’impact d’un parti est également en rapport avec les réseaux tissés, les échanges sociaux développés, les réalisations effectuées. Bien plus, les politologues commencent à s’en apercevoir : l’émotionnel, l’insertion dans un groupe concret favorisent l’identification politique. Et, souvent, ce n’est que par la suite qu’on intègre les schémas idéologiques. Ceci reste valable pour la gauche comme pour les islamistes.
La famille est certes présente, mais à côté de bien d’autres lieux de socialisation. Une chose est certaine, la proximité, au sens large, tend à s’ériger en vertu politique. La «bonne» représentation est donc de plus en plus associée à l’égalité plutôt qu’à la hiérarchie. S’il y a “sous-ancrage” des partis au Maroc, il doit être analysé à partir d’autres variables.
Pour ma part, j’aurai tendance à inverser les choses. L’ancrage d’un parti est également tributaire de son aptitude à investir plusieurs instances de sociabilité, à réinventer le travail de proximité. Ne l’oublions pas, la représentation politique peut se conjuguer avec la représentation sociale.

Com’ese

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