Hassan Bousselmane est tombé dans la marmite de la concurrence au sortir de la fac

Titulaire d’une maîtrise en économie en 1987, il est aussitôt recruté comme chargé d’études à  la Primature.
Il a passé toute sa carrière à  la direction des prix et de la concurrence.
Son nouveau chantier : évaluer les 11 ans de la loi sur la concurrence et réformer.

S’il y a bien quelqu’un qui peut vous parler sans tarir sur la question de la concurrence, des prix et du fonctionnement des marchés de différents produits, que ceux-ci soient réglementés ou non, c’est bien lui. Et pour cause, il est plongé dedans depuis 23 ans ! L’actuel directeur des prix et de la concurrence au ministère des affaires économiques et générales, Hassan Bousselmane, est la mémoire de cette direction où il a commencé quand elle n’était encore qu’une division rattachée à la Primature. Depuis la fin des années 80 (au beau milieu de la mise en œuvre du programme d’ajustement structurel) à ce jour, rien ne lui échappe sur les domaines des prix et de la concurrence. Hassan Bousselmane est né à Khémisset en 1964 dans une famille moyenne. Il est le quatrième enfant d’une fratrie de huit garçons et filles. Son père est cadre administratif au ministère de l’éducation nationale et sa mère femme au foyer. Il se rappelle avoir été un «enfant sage» qui a été très encadré dans ses études. C’est à Rabat où la famille s’est installée après sa naissance qu’il fait ses études primaires et secondaires. Après un bac «Sciences éco» en 1982, il s’inscrit tout naturellement à la Faculté des sciences juridiques et économiques de l’Université Mohammed V où il obtient, en 1987, sa maîtrise en «Economie de l’entreprise» qui venait d’être créée. Une partie de sa promotion, dont lui-même, est recrutée par la Primature avec le statut de chargé d’études. Il hérite, entre 1988 et 1995, des dossiers de la libéralisation des prix et de l’élaboration de la loi sur la concurrence. Ce qui l’amène aussi à travailler sur le processus de la décompensation du ciment, du beurre et des engrais.

Il a eu à gérer des dossiers sensibles comme l’affaire Lesieur/Savola

Hassan Bousselmane se souvient encore des recommandations du FMI et de la Banque mondiale : vérité des prix, suppression des monopoles et libéralisation du commerce extérieur. Il va, dans ce cadre, travailler à la suppression de ce qui s’appelait alors «les licences» pour arrimer l’économie marocaine à l’économie mondiale et la soumettre aux problématiques de la concurrence, de la qualité et des normes.
Entretemps, en 1993, la direction est intégrée au ministère de l’incitation à l’économie, également chargé des affaires économiques auprès du Premier ministre, ainsi  que des services du plan et de la statistique.
Hassan Bousselmane évolue assez rapidement en devenant, entre 1995 et 1999, le chef du département des affaires administratives en charge des ressources humaines. Il se rappelle qu’à l’époque, le ministère comptait un effectif total de 130 personnes contre 250 aujourd’hui. Il va restructurer le département administratif, introduire la formation, ouvrir la voie à l’information encore embryonnaire pour mieux servir la mise en place de l’analyse économique. Même s’il n’a jamais été tenté par la politique, il sera le représentant du gouvernement dans la commission du dialogue social. Un des gros problèmes du moment était la réinsertion de tous les prisonniers politiques qui avaient été graciés par feu Hassan II.
En 1999, il revient à la direction des prix et de la concurrence, toujours comme chargé d’études, avec une mission clairement définie : mener la phase finale de la préparation de la loi sur la concurrence qui va être promulguée en 2000. Par la suite, ce sont des dossiers cruciaux qui vont atterrir à la direction.
D’abord l’affaire de la société IMTC du commandant Mohamed Karia à laquelle le pool maroco-espagnol opposait une concurrence déloyale. La direction de la concurrence et des prix n’aura pas besoin d’intervenir directement dans ce dossier qui connaîtra un dénouement par le biais du ministère du commerce et de l’industrie. Par contre, elle prendra la décision d’invalider la décision de l’ordre des architectes qui voulait imposer un prix minimum. Puis, ce sera, en 2006, l’affaire opposant Savola à Lesieur qu’il a la lourde tâche d’instruire et qu’il a fallu traiter avec le plus d’objectivité possible, vu les enjeux qu’elle représentait et la taille des entreprises.

Son credo, le respect des prérogatives des régulateurs sectoriels

Mais au-delà des dossiers retentissants, «la direction est sollicitée aussi dans les grandes opérations de concentration et de fusion qui peuvent déstabiliser le marché en créant une situation de domination ou de déséquilibre pour les autres intervenants du secteur. Nous avons validé, par exemple, le rachat des Brasseries du Maroc par Castel ou encore l’acquisition de Kraft Foods par Cadbury, en tenant compte de ces contraintes», explique Hassan Bousselmane qui, avant d’être officiellement nommé par dahir directeur en juin 2010, a été chargé de mission en 2005 et chargé de la direction depuis 2007. Bien entendu, chaque fois qu’il y a un régulateur dans un secteur, la direction des prix et de la concurrence se refuse à intervenir. Hassan Bousselmane confie qu’il y a déjà beaucoup à faire avec la réforme de la compensation (aujourd’hui, cela représente 20 milliards de DH contre 4,5 milliards en 2002), la mise en forme des prérogatives du Conseil de la concurrence et le développement de la culture de la concurrence.
Parallèlement à ces grands chantiers dont il est l’un des principaux responsables, M. Bousselmane souligne qu’«il est nécessaire de faire une évaluation des 11 ans de la loi sur la concurrence et proposer de revoir certaines de ses dispositions». Une commission ministérielle a d’ailleurs été créée à cet égard pour donner plus de poids au conseil. Y siégeront les départements ministériels concernés, mais aussi les opérateurs, les associations de consommateurs et des parlementaires. Un nouveau grand chantier en perspective.