Fusion imminente entre le MP et le MNP

Dans un premier temps, les groupes des deux partis au sein de la deuxième Chambre n’en feront plus qu’un.
L’annonce officielle devrait se faire d’ici à fin mai.
L’UD de Bouazza Ikken refuse de rejoindre l’attelage.
Le MNP et le MP vont vers la fusion au pas de charge. C’est du moins ce qui se dégage des déclarations des principaux responsables des deux formations. Tout laisse à croire que les deux partis n’en feront plus qu’un d’ici quelques mois. Selon Mohamed Mansouri, président du groupe du MNP à la Chambre des conseillers, «l’été devrait être le moment pour la tenue d’un congrès d’union entre les deux partis. En attendant, un processus va se déclencher dans les régions pour unifier les structures à la base. Dans ce sens, nous disposons déjà d’un seul coordinateur pour la région de Khénifra.» Le ton est à la fois optimiste et résolu. Le grand soir ne semble plus très loin pour les militants harakis des deux bords, même si Saà¯d Ameskane, membre du bureau politique du MP, semble être moins chaud : «Aucune date n’a encore été fixée. Il est prématuré de parler maintenant de fusion. Même si le processus est engagé, il reste toutefois plusieurs points à discuter, notamment la composition du bureau politique et de la direction de la prochaine formation et, bien sûr, il faut que les congrès des deux partis donnent leur accord.»
Les élections de 2007 en ligne de mire
Un bémol qui ne manque pas d’intriguer. Le MP serait-il en train de tergiverser ? Craint-il la fougue du MNP? En apparence oui, même si Mohamed Boutaleb, ministre MNP de l’Energie et des Mines, se veut rassurant : «Le processus de fusion, qui a commencé par la création d’un seul groupe parlementaire, arrive à son terme. 2005 verra le retour à un seul parti. Personne ne traà®ne les pieds. La fusion est acquise.»
On n’en est donc plus aux premiers frémissements. Les réunions entre les deux formations se succèdent dans le secret le plus total. Les harakis veulent surprendre le landernau politique. Ainsi, mardi 3 mai, un autre pas de géant a été franchi vers la fusion totale. Le groupe MNP à la deuxième Chambre du Parlement s’est réuni chez Mahjoubi Aherdane. Les conseillers ont donné leur accord afin de créer un seul groupe au sein de la deuxième Chambre. «Les conseillers sont les plus proches des militants parce qu’ils sont tout le temps en contact avec eux», rappelle Mohamed Mansouri, avant d’ajouter qu’«il n’y a aucune différence ni idéologique ni de méthodologie entre les deux mouvements.» Une vérité que les dirigeants de la mouvance populaire ont mis une vingtaine d’années à comprendre.
Les prochaines échéances électorales sont également pour beaucoup dans ce processus de fusion. On savait qu’Aherdane en avait assez de constituer, à chaque fois, la force d’appoint que se disputent tantôt l’Istiqlal tantôt l’USFP. «Maintenant, on est sûr qu’il ne veut plus du rôle de comparse de service. Il estime qu’un Mouvement populaire reconstitué et soudé autour de ses dirigeants damera le pion à la Koutla et aux islamistes», avoue, sur le ton de la confidence, un des plus proches collaborateurs de l’Amghar. Les dirigeants harakis ont en ligne de mire les élections de 2007 qui devraient être l’heure de vérité pour le futur parti unifié. Leur calcul est simple : les deux composantes de la mouvance ont glané, lors des élections législatives de 2002, une cinquantaine de sièges, même si elles se sont présentées en rangs dispersés. La fusion devrait, selon leur logique, leur permettre d’en engranger plus. «Si l’actuel scrutin de liste est maintenu, il n’est pas dans notre intérêt de nous présenter unis aux élections car, au lieu d’avoir trois listes, nous n’en aurons qu’une seule», tempère, sceptique, Saà¯d Ameskane. Un raisonnement qui peut sembler aberrant de prime abord, mais qui se vérifie si l’on regarde à la loupe les circonscriptions. Les fusions n’aboutissent que rarement à un gain conséquent en sièges et en voix.
La fusion souhaitée par deux des trois membres de la Mouvance populaire est toutefois snobée par Bouazza Ikken qui préfère garder son autonomie. L’ex-magistrat est prêt à fédérer et non à fusionner. Une nuance qui lui permet de garder la haute main sur son parti. «L’Union démocratique de Bouazza Ikken est un allié stratégique pour nous. Certes, il ne participera pas à la fusion, mais demeure quand même très proche de nous», justifie, embarrassé, Mohamed Boutaleb.
L’inimitié entre Ikken et Aherdane encore vivace
Du côté du MP, la position d’Ikken ne semble pas trop gêner : «C’est son droit le plus absolu de ne pas vouloir fusionner. On ne peut pas lui dicter sa conduite», affirme Saà¯d Ameskane. Si le MP est plus serein concernant la question de l’UD que le MNP, c’est qu’Aherdane n’oublie pas que qu’Ikken avait claqué la porte du MNP avec la moitié des députés, obligeant l’ancien caà¯d d’Oulmès à redoubler d’efforts pour reconstituer un groupe parlementaire. Depuis, les blessures ne se sont pas cicatrisées et les deux hommes continuent à se détester cordialement.
Certains connaisseurs de la maison harakie jugent toute tentative de réunification vaine en raison des spécificités des partis de la mouvance. «Le MP et le MNP ne sont pas des partis au sens classique du terme avec une hiérarchie respectée et des institutions qui se réunissent régulièrement. Les liens qu’ont les militants avec ces structures sont épisodiques, distancés», fait remarquer un cadre du MP, avant d’ajouter, moqueur : «La Mouvance populaire c’est comme “Loft story” ou presque. Tout le monde veut rester dedans, mais chacun tire la couverture à lui.» Il faut espérer que le scénario ne sombre pas dans le ridicule de ce reality show.
On est optimiste au sein des formations de Mohand Laenser (à g.) et Mahjoubi Aherdane (au centre), mais, en décidant de rester autonome, Bouazza Ikken (à dr.) a un peu gâché la fête.