Nominations de hauts responsables : couronnements, revanches et surprises
D’anciennes figures qui s’étaient retrouvées au placard
sont remises en selle.
Les jeunes cadres sont de plus en plus responsabilisés.
Les femmes font une timide apparition dans la haute administration.
A deux jours seulement des élections communales, la nomination par le Souverain de hauts responsables (mercredi 10 septembre) est venue animer un paysage que la campagne électorale avait du mal à occuper. Au-delà de ce timing, certes assez particulier, ces nominations interpellent à plusieurs titres. Dans la liste on retrouve, en effet, des noms qui avaient disparu de la scène, d’autres qui étaient depuis très longtemps promis à une promotion et, comme d’habitude, des noms inconnus.
• Ceux qui ont reçu la consécration
Dans la catégorie des confirmations, on retrouvera Zouhair Chorfi, directeur du Trésor et des finances extérieures. Ce pur produit du ministère des Finances passe pour être l’éminence grise du département de Oualaâlou et la véritable cheville ouvrière de la Direction du Trésor. Il est, à titre d’exemple, l’artisan des réformes en cours de la loi bancaire et des marchés financiers ainsi que des nouveaux statuts de Bank Al Maghrib. Dans son entourage, sa nomination en tant que directeur est considérée comme une consécration somme toute naturelle.
Il prendra donc la place de son patron, Abdeltif Loudiyi, qui passe lui aussi pour être un personnage incontournable dès que l’on rentre dans la sphère des finances publiques. Bref, il était le secrétaire général idéal.
L’autre consécration, elle aussi attendue depuis longtemps, est celle de Fayçal Laâraïchi à la tête de la RTM. Nommé dans un premier temps à la tête de la TVM uniquement, ce manager new wave avait les mains liées et ne pouvait pas engager une vraie réforme de fond. Avec sa nomination, il se retrouve donc seul et véritable maître à bord. Un homme libéré, en somme !
Dans la catégorie des confirmations, on retrouvera également Mohamed Lididi, propulsé secrétaire général du ministère de la Justice. L’excellent travail qu’il a accompli à la tête de l’administration pénitentiaire a certainement été pour beaucoup dans cette ascension. Et on pourra citer cette nomination inédite d’une femme à la tête de l’Agence urbaine de Casablanca. Fouzia Imansar, c’est son nom, a déjà fait ses preuves à la tête de l’Agence urbaine de Rabat. Enfin, Mohamed Khabachi, lui, a gravi les marches lentement mais sûrement jusqu’à devenir le patron de la MAP.
• Ceux qui ont pris leur revanche
Mais les nominations annoncées mercredi auront incontestablement retenu l’attention en remettant sur la scène des noms qu’on croyait trop tôt disparus.
Dans cette catégorie, Mostafa Benali, nouveau directeur général de 2M, a réussi un véritable coup de maître. Ecarté en 2000, dans des conditions controversées, par Noureddine Saïl, alors fraîchement nommé à la tête de la chaîne, Mostafa Benali revient aujourd’hui par la grande porte. Certains font déjà la fête dans les couloirs de 2M mais d’autres, qui lui avaient tourné le dos à l’époque, et ils sont nombreux, n’en mènent pas large. Au passage, notons que Noureddine Saïl, lui, renouera avec ses premières amours, le cinéma, puisqu’il se voit nommer directeur général du Centre cinématographique marocain.
Un autre retour, non moins remarqué, est signé Ahmed Lahlimi. Cet enfant terrible de l’USFP avait fini par être écarté de la liste des ministrables malgré ses relations bien placées. Sa brouille avec certains dirigeants du parti y est certainement pour quelque chose. Mais il a fini par avoir gain de cause avec sa nomination au poste de haut-commissaire au Plan.
Mais M. Lahlimi n’est pas le seul à avoir fait les frais du gouvernement Youssoufi puisque deux autres revenants s’étaient eux aussi éclipsés pour des raisons d’incompatibilité d’humeur avec leurs ministres. Le premier, Abdeladim Lhafi, nommé aujourd’hui Haut commissaire aux Eaux et Forêts avait eu quelques déboires avec Habib El Malki. Juste avant l’arrivée du gouvernement d’alternance, M. Lhafi était secrétaire général au ministère de l’Agriculture, depuis 1993. Quand Habib El Malki prit les commandes du département en mars 1998, Lhafi en était encore l’homme fort et incontournable à tel point qu’il faisait parfois de l’ombre à son propre ministre. Un des deux devait partir. Le gouvernement trancha en faveur du ministre. Maigre consolation, Abdeladim Lhafi fut nommé ambassadeur en Allemagne, en septembre 1999. Aujourd’hui, il tient sa revanche.
Tawfik Cherkaoui, nommé directeur général de l’Agence nationale de la conservation foncière, est également remis en selle. Produit du ministère des Finances, où il fera d’ailleurs ses premières armes à l’inspection, il se fera très vite remarquer et sera nommé à la tête de la Direction de la Statistique. Une direction qu’il mettra en évidence jusqu’en 1998, date à laquelle la direction fut placée sous la coupe du ministre du Plan, Abdelhamid Aouad, avec qui il eut des relations mouvementées. Une fois de plus, l’arbitrage fut en faveur du ministre et Tawfik Cherkaoui se vit proposer plusieurs postes, entre autres au ministère des Finances. Il finit par atterrir, en tant que conseiller, dans le cabinet de Fouad Ali Himma. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui reconnaissent que sa nomination n’est que justice.
• Ceux que l’on n’attendait pas
D’un autre côté, on ne peut pas ne pas évoquer certaines nominations particulières et d’autres un peu surprenantes. Ainsi, Mohamed El Alj nommé à la tête de la Direction des douanes, confirme sa réputation de «nettoyeur» attitré. Après la CTM à l’époque où elle était encore publique, l’ONCF qu’il remit sur les rails et le CIH qu’il a plus ou moins réussi à sortir de la zone de turbulences, une mission – encore une avant la retraite ? – lui est confiée.
L’autre cas remarquable est celui de Saïd Ibrahimi qui, à 46 ans, se trouve propulsé aux cimes de l’administration puisqu’il a été nommé Trésorier général du Royaume. Un poste aussi prestigieux que rémunérateur. Fait intéressant à relever : Saïd Ibrahimi est passé progressivement du secteur privé (BMCI) au secteur semi-public (Crédit agricole) et finit par devenir un haut fonctionnaire à part entière en tirant, en plus, le jackpot. Qui dit mieux ?
D’autres stars montantes font également leur entrée dans la cour des grands tel Mohamed Benchaâboune nommé à la tête de l’ANRT, après un brillant passage à la BCP, où il était le bras droit de Noureddine Omary. Cet ingénieur de formation allie, selon ceux qui l’ont connu de près, intelligence, compétence et capacité de travail. Ou encore Abdelhanin Benallou qui prend les commandes de l’Office des aéroports, un peu moins de deux ans après avoir été nommé directeur général du Centre des énergies renouvelables (CDER). On n’oubliera pas non plus Tarik Sijilmassi qui, à 39 ans à peine, est nommé directeur général du Crédit agricole. Comme quoi, tout survient à point pour qui sait attendre. Et ils sont certainement nombreux à attendre d’être nommés quelque part. D’autant plus que, selon des sources bien informées, une seconde fournée de hauts commis de l’Etat devrait être nommée dans les prochains jours. Préparez vos cartons !