Loi de finances : ce qui changera finalement en 2010

Les patrons ont pu rattraper quelques mesures qui n’avaient pas été retenues à la première Chambre.
Exonération de TVA pour certains produits et outils agricoles.
Le logement social sauvé in extremis et le Fonds de solidarité familiale renvoyé à janvier 2011.
Revue de tous les changements majeurs pour 2010.
Le projet de Loi de finances 2010 termine dans quelques jours un parcours législatif au terme duquel il aura subi quelques modifications qui ne manqueront pas de satisfaire un monde entrepreuneurial, donné déçu pour n’avoir pas réussi à faire admettre, entre autres, la baisse de l’impôt sur les sociétés (IS). Au lieu de cela, l’entreprise a obtenu au minimum des compensations sous forme, notamment, d’amélioration du dispositif juridique des fusions/scissions, d’encouragement au passage de personne physique à personne morale, de reconduction pour encore trois ans des avantages accordés aux sociétés qui s’introduisent en Bourse… Ce n’est pas rien, cela fait même partie des demandes du patronat qui ne cessait de réclamer une neutralité fiscale pour les opérations de transformation de l’entreprise. Mieux, on peut considérer, et c’est sûrement le cas, que la réforme de l’impôt sur le revenu (IR) ne profite pas qu’aux salariés. L’entreprise aussi est concernée par le bénéfice de cette réforme puisqu’elle peut se permettre de renforcer son encadrement dans des conditions fiscales plutôt améliorées. Il y a deux ans, un responsable à la CGEM avait même considéré que la réforme la plus importante à introduire était justement celle de l’impôt sur le revenu, tant elle était de nature à impacter positivement l’entreprise marocaine, caractérisée par un sous-encadrement manifeste.
Bien sûr, des parlementaires comme des observateurs auraient voulu que la refonte de l’IR aille encore plus loin, en particulier en “donnant” plus aux catégories les plus vulnérables. Des députés de l’opposition ont d’ailleurs essayé de faire valoir l’idée que la tranche exonérée mériterait d’être relevée à 35 000 DH, par exemple, au lieu de 30 000 DH. Mais une Loi de finances, ce sont des arbitrages du gouvernement, en fonction des priorités arrêtées et des moyens disponibles. Cela dépend aussi de l’implication des députés et de leur capacité à introduire des améliorations. Et justement, malgré les couacs que l’on sait, le texte présenté par le gouvernement au Parlement en sortira modifié, et pour l’essentiel, cela va de soi, les amendements sont l’œuvre des députés ; mais cette précision n’est pas si évidente qu’elle en a l’air, car le gouvernement a lui aussi apporté des modifications à son projet initial. A titre d’exemple, sur les dix-huit amendements introduits dans le texte lors de son passage à la Chambre des conseillers, cinq sont l’œuvre du gouvernement.
Sans doute, les amendements les plus significatifs sont-ils relatifs au logement social, un sujet qui, un moment, paraissait complètement mis de côté. La machine est désormais remise en marche, moyennant bien entendu des garde-fous qu’il semblait nécessaire de mettre en place. C’est une bonne nouvelle à la fois pour les prétendants à ce produit à prix modéré et pour les entreprises, surtout les petites et les moyennes, désireuses d’opérer dans ce secteur. Evidemment, une Loi de finances n’est pas faite que pour les salariés et les entreprises, elle régit ou est censée régir l’ensemble de l’activité socio-économique d’un pays. C’est ainsi que, poursuivant le processus de réforme fiscale entamé (avec régularité) ces cinq dernières années, en particulier sur le volet de la fiscalité dérogatoire, le gouvernement a procédé à certains ajustements de la TVA et de la TIC notamment. Inutile de rappeler ici les détails de ces changements (voir page suivante), retenons simplement que l’idée sous-jacente à cette action est celle de réduire, à terme, au strict minimum le nombre de taux de la TVA, d’un côté, et de supprimer les effets du butoir que sont les crédits de TVA, toujours problématiques. Mais ce faisant, des consommateurs peuvent en ressentir les effets puisque, nécessairement, le toilettage de la TVA (suppression des taux faibles et des exonérations) se traduit par la hausse des taux et donc, parfois, par la hausse des prix des produits ou services concernés. C’est du reste autour de cette préoccupation qu’eut lieu le débat pour ne pas dire la polémique à propos de la hausse de la TVA sur les produits pétroliers.
En fait, cette réforme de la TVA, et de la fiscalité indirecte de manière générale, il faudrait peut-être l’appréhender dans un ensemble : elle n’a de sens que couplée à d’autres réformes qui, selon les cas, devraient permettre de créer des sources de revenus (c’est le plus important) et faire bénéficier les plus démunis d’aides directes. En d’autres mots, l’action à travers la fiscalité ou à travers d’autres mesures devrait se traduire par plus de créations d’emplois, d’un côté, et une réforme du système de compensation, d’un autre côté. Cela pose en creux toute la problématique de la captation des ressources et de leur utilisation la plus efficace et la plus équitable possible. Sans doute, est-ce au regard de cet enjeu que le vote de la Loi de finances est un moment important dans la vie d’un pays.