L’immobilier entraîne dans sa chute le marché du mobilier domestique

Aussi bien chez les enseignes de kit que de bois massif, l’année aura été celle du recul
La baisse des ventes de nouveaux logements n’est pas la seule cause, le taux de renouvellement est également en baisse chez les ménages déjà installés
Le segment du moyen de gamme semble avoir été le plus touché.
La crise de l’immobilier, illustrée par la baisse des ventes de logements, n’a pas manqué de se répercuter sur le marché du mobilier. Certains professionnels tiennent tout de même à préciser que l’immobilier n’est pas la seule cause des difficultés de leur secteur qui connaît des moments difficiles. C’est un autre créneau, celui du renouvellement de l’équipement des maisons, qui est touché. Indicateur pertinent de cette baisse, celui d’un fabricant en amont et en aval du secteur, le groupe Richbond, à la fois gros fournisseur de matelas et coussins de canapés, des diverses enseignes de mobilier mais également producteur lui-même de produits finis. La crise se serait installée, selon un responsable du groupe, «depuis le début 2008 en raison du tassement du pouvoir d’achat». Il annonce avoir enregistré une légère croissance de 2% en 2008 et une stagnation de son chiffre d’affaires en 2009.
40% de baisse chez certaines enseignes
L’intensité de la crise est cependant différente selon les segments du marché. Le plus touché est le moyen de gamme. Italmobili, importateur et distributeur de meubles et de cuisines en provenance d’Italie, en est une parfaite illustration. L’exercice 2009 a été catastrophique. «En fait, la baisse des ventes a commencé il y a deux ans déjà. Nous avons enregistré un recul de 20% en 2007 et en 2008 et il s’est aggravé en 2009 pour atteindre 40% !», raconte le responsable du magasin sis au bd. Abdellatif Benkaddour à Casablanca. L’essoufflement des ventes a été ressenti aussi bien au niveau du portefeuille des promoteurs immobiliers, pour ce qui est des cuisines, que de celui des particuliers dont la demande porte essentiellement sur les meubles (salons, salles à manger, meubles TV, etc.).
Même le meuble en kit, pourtant plus abordable, tire difficilement son épingle du jeu. Une baisse du chiffre d’affaires est signalée chez Mobilia. «Habituellement, l’activité croît de 10 à 15% par an. En 2009, il y a eu un recul de 5% et cela est compréhensible car l’ensemble du secteur est sur une tendance baissière» , explique un responsable de l’enseigne qui ajoute que le recul touche aussi bien le mobilier moyen de gamme qui est le cœur de cible que le haut de gamme. Pour leur part, les responsables de Kitéa font état d’un essoufflement des ventes qui n’a cependant touché que les magasins de Marrakech et Tanger. A Casablanca et Rabat, l’activité s’est bien comportée.
En général, il n’y a pas de stratégie particulière pour parer à la régression des ventes. Chez Mobilia, il y aura comme à l’accoutumée les promotions de fin d’année et la mise en place de la nouvelle collection au printemps 2010. A Italmobili, «on préfère attendre que la crise passe. Il n’y a rien d’autre à faire !».
En revanche, chez Kitéa, on estime au contraire que les entreprises doivent, pour s’en sortir, développer de nouveaux services et surtout de nouvelles gammes de produits pour élargir leur clientèle cible. Les responsables de cette enseigne soulignent que le concept «Kitéa Géant» développé dans les villes de Casablanca, Marrakech et Oujda a permis à l’entreprise de mieux supporter la crise.
Globalement, ces enseignes estiment que la crise pourra être dépassée en 2010 mais les professionnels du secteur ne sont pas unanimes là-dessus. Certains d’entre eux n’affichent pas le même optimisme. «Le secteur connaît un véritable marasme après avoir connu un grand essor suite au boom de l’immobilier. Aujourd’hui, les ventes s’inscrivent à la baisse et il y a une vive concurrence entre les grandes enseignes et les importateurs de meubles en bois massif en provenance de pays asiatiques comme la Malaisie, l’Inde et la Chine. D’ailleurs, plusieurs enseignes de la place sont actuellement en difficulté et se restructurent pour faire face aux temps difficiles», se désole un opérateur.
En effet, un tour dans la ville de Casablanca permet de constater que le secteur est en cours de reconfiguration géographique. Par exemple, Nidary a concentré toute son activité dans son magasin du quartier Californie, alors qu’elle en avait deux autres, Layalits a également fermé son magasin de Rahal Meskini et l’enseigne turque Kebelec arrivée au Maroc en 2007 a plié bagages.
Quand on est riche on ne compte pas…
Cela dit, et contrairement au moyen de gamme, le mobilier de luxe semble avoir mieux résisté. «L’immobilier haut standing a certes été affecté par la crise, il n’y a pas eu beaucoup de ventes de logements, par conséquent nous avons eu un petit essoufflement d’activité. Cependant, notre clientèle déjà installée dans des logements haut de gamme a continué, en dépit de la crise et comme chaque année, à acheter de nouveaux meubles pour changer et relooker ses intérieurs. Il faut préciser que dans le haut de gamme, nous avons des clients qui renouvellent leur mobilier de manière plus fréquente, ce qui fait que nous avons un flux d’affaires régulier», explique le responsable d’une enseigne de mobilier haut de gamme. Chez une autre enseigne du même segment, on reconnaît effectivement que les affaires se sont bien comportées depuis le début de l’année, mais le gérant tient à préciser quand même que la croissance de ses ventes enregistrée durant les neuf premiers mois de 2009 est légèrement en deçà de l’évolution normalement des années antérieures. Sur les quatre dernières années, ce distributeur affirme que son chiffre d’affaires a progressé de 20 à 25% par an.