L’Etat recapitalise à  nouveau Autoroutes du Maroc pour 1,15 milliard de DH

Une opération destinée à  rééquilibrer quelque peu les comptes financiers de la société. ADM devra investir 7 milliards de DH rien qu’au titre de l’année 2011.

Une énième recapitalisation pour Autoroutes du Maroc (ADM) en ce début d’année. En effet, La Vie éco a appris que le concessionnaire marocain du réseau autoroutier marocain s’apprête à solliciter, à nouveau, dès le 17 janvier 2011, ses actionnaires pour un montant global de 1,15 milliard de DH en fonds propres. Ce qui hissera son capital de 10,02 milliards de DH à 11,17 milliards de DH. L’Etat marocain y apportera la majeure partie en consolidant au passage sa position d’actionnaire majoritaire d’ADM à 96,5% dont 55% pour le Trésor et 46% pour le Fonds Hassan II. Il faut signaler que lors de l’augmentation de capital intervenue en juillet dernier, le Trésor était déjà devenu le premier actionnaire du concessionnaire étatique du réseau autoroutier avec 50,6% de parts, devant le Fonds Hassan II, qui n’avait pas suivi, à l’époque, la recapitalisation (45,9%). Le reste étant détenu par le Kuwait Investment Authority (1,1%) et de petits actionnaires.  

Un contrat-programme signé avec l’Etat qui court jusqu’en 2015

Cette nouvelle recapitalisation intervient à quelques semaines d’intervalle avec une émission obligataire ayant permis de lever un montant assez proche en fin novembre 2010, un milliard de DH en l’occurrence. Il faut rappeler que le même scénario s’est répété, puisque avant l’augmentation de capital précédente, une émission obligataire de 2 milliards de DH avait eu lieu en avril 2010. Lors de l’émission de novembre dernier, et avec la garantie de l’Etat, ADM avait pu se «servir» à l’occasion de cette sortie sur le marché financier avec un taux d’intérêt fixe assez faible (entre 4,19% et 4,95% selon la tranche et la durée qui avait oscillé entre 5 et 10 ans).
En tout état de cause, l’augmentation de capital, malgré les sommes de plus en plus importantes levées en douze mois, se justifie. Avec une dette supérieure à 24 milliards de DH et une trésorerie nette de 1,85 milliard de DH, l’endettement net représente près de 300% des fonds propres (qui s’élèvent à 7,5 milliards de DH) à fin juin 2010. Et c’est surtout le ratio Dettes Nettes/EBE (Excédent Brut  d’Exploitation) qui, en caracolant à 46, rangerait imparablement ADM parmi la catégorie de «junk bond» si elle venait à être notée par une agence de notation. D’où la nécessité de renforcer constamment les fonds propres à l’issue d’un programme d’investissement assez ambitieux entre 2006 et 2010 (25 milliards de DH) et à l’aube d’un nouvel effort non moins intense qui requiert une enveloppe de plus de 9,1 milliards de DH en 2011 dont 7 milliards de DH en investissement. Outre la poursuite durant l’année en cours du chantier de l’élargissement à 2×3 voies de l’autoroute Casa-Rabat (coût total : près d’un  milliard de DH) qui connaîtra imparablement un retard d’un an à cause de la défection de l’entreprise portugaise des travaux, Conduril (voir rubrique En Direct, page 6), ADM devra entamer les travaux de contournement de Rabat (coût total : 2,7 milliards de DH) ainsi que ceux de l’autoroute Berrechid-Béni-Mellal (coût total : 6 milliards de DH). Le parachèvement du dernier tronçon de l’autoroute Fès-Oujda (320 km) est également au programme cette année.
L’Etat continuera donc à apporter son concours à ADM au moins jusqu’en 2015, échéance du contrat programme actuel à l’issue duquel la société étatique pourra enfin entamer une phase de «digestion» des investissements colossaux qu’elle aura réalisés en 15 ans. Et, théoriquement, l’établissement devra revenir à une situation de création nette de trésorerie avec un cash opérationnel qui ne sera pas totalement englouti par les charges financières et l’effort d’investissement.
Rappelons que le réseau autoroutier actuel totalise près de 1 100 km et devra atteindre 1 800 km en 2015. Avec une évolution du trafic supérieure à deux chiffres au cours des dernières années (+13% à fin juin 2010), ADM devra tutoyer les 3 milliards de DH de chiffre d’affaires en 2015. Sera-t-elle alors une société rentable ? Avec le lancement concomitant du TGV marocain et l’intensification du trafic aérien domestique, cela semble assez périlleux mais gageons que l’embellie opérationnelle sera le principal levier dans ce sens.