Les chances de redressement du textile s’amenuisent

L’Etat tarde à annoncer des mesures concrètes pour améliorer
la compétitivité du secteur
Le moral des industriels oscille au gré des bonnes et mauvaises nouvelles.
Le textile oscille entre bonnes et mauvaises nouvelles. D’une part, on enregistre un léger frémissement chez quelques opérateurs, qui évoquent la prudence des donneurs d’ordre qui, voulant anticiper les retombées d’un accord de limitation des exportations chinoises, ont réduit leurs commandes vers ce pays. Plusieurs exportateurs marocains signalent le retour de certains clients. D’autre part, on apprend que les exportations marocaines, selon les dernière statistiques fournies par le ministère du Commerce et de l’Industrie, ont enregistré une baisse de 16 % depuis le début de l’année. La régression a été importante au cours des mois de janvier et février puisqu’elle a respectivement atteint 30 % et 20 %.
Aujourd’hui, malgré les prémices d’une nouvelle réorientation des commandes en faveur du Maroc, les craintes sur l’avenir du secteur persistent. La raison en est que les industriels attendent toujours le feed-back du gouvernement en ce qui concerne l’état d’avancement du plan d’urgence. Certes, une réunion était prévue mercredi 22 juin, mais les industriels ne se font pas trop d’illusions. «Il n’y aura pas d’annonce de mesures concrètes, le gouvernement va faire le point sur les fonds de restructuration financière et sur la promotion du secteur», avance-t-on à l’Amith (Association marocaine des industries textile et de l’habillement). Or, affirment les industriels, «les autorités devraient rapidement réagir afin d’aider le secteur qui est gravement affecté par la crise». Plus on diffère les mesures, moins il y a de chance de relancer la machine ou sauver ce qui peut l’être.
Des opérateurs tentés de délocaliser
On indique dans la profession que de nombreuses unités, opérant dans diverses filières, ont mis la clé sous le paillasson depuis le début de l’année. «Les industriels n’arrivent plus à faire face à leurs charges… Plusieurs entrepreneurs n’ont même pas de quoi payer leurs ouvrières !», déplore un opérateur qui vient de restructurer son groupe. Sur ses trois sites de production d’articles de sportswear, l’effectif est passé de 2 400 à 700 ouvriers en 18 mois. Son chiffre d’affaires, qui se situait en moyenne à 250 MDH, est tombé à 40 millions. «Je ne suis pas le seul à vivre cette situation, plusieurs de mes confrères sont acculés aujourd’hui à réduire le personnel, baisser la production et parfois même baisser le rideau!», tempête-t-il.
Deux raisons sont, selon cet industriel, à l’origine de cette situation. La première est que les banques ont fermé le robinet pour les entreprises du secteur et refusent tout rééchelonnement des dettes. Plusieurs opérateurs sont actuellement en litige avec leurs banquiers et risquent d’arrêter leur activité. La seconde, elle, a trait à la perte de compétitivité du produit marocain. Le cas d’un important fabricant de jean qui a délocalisé la fabrication de certains de ses articles en Egypte est révélateur. Ne délocalise pas qui veut, argue-t-on à l’Amith, car «il faut avoir les structures nécessaires pour gérer à distance une filiale». Certes, mais avec un Smig à 50 euros (550 DH), d’autres industriels peuvent être tentés d’y aller.
Enfin, il est étonnant de constater que l’on ne sait pas combien d’unités ont fermé jusqu’à présent. L’Amith ne peut fournir un bilan exact. Le ministère du Commerce et de l’Industrie, qui vient de boucler une enquête lancée il y a quelques semaines, n’a toujours pas communiqué les résultats. Même pas à l’association en question, ce qui fait dire à cette dernière que «lesdits résultats doivent être bien mauvais…». Il semblerait que les deux villes les plus touchées par les fermetures soient Marrakech et Fès
Les exportations de textile ont baissé de 16% depuis le début de l’année.