Les carreaux égyptiens inquiètent les céramistes marocains

De 2 600 tonnes en 2006, les importations d’origine égyptienne ont atteint 25 600 tonnes en 2009.
Les industriels attirent l’attention des pouvoirs publics sur cette évolution inquiétante.
L’Egypte n’est pas concernée par les mesures de sauvegarde en vigueur jusqu’à  fin 2010.

A peine les importations de céramique en provenance de nos fournisseurs traditionnels, en particulier l’Union européenne, la Tunisie, la Chine et les Emirats Arabes Unis, maîtrisées, les producteurs nationaux doivent faire face aux produits égyptiens non concernés par les mesures de sauvegarde instaurées en 2006 et reconduites fin 2009. Les pouvoirs publics avaient soumis les importations, effectuées en dehors du contingent fixé par le ministère du commerce extérieur, à un droit additionnel de 1,50 DH par kg net. Or, à l’époque, l’Egypte n’était pas un gros exportateur, mais entre-temps, il a développé son industrie et a profité de sa liberté d’action pour investir le marché marocain. Ses expéditions ont progressé régulièrement, passant de 2 600 tonnes en 2006 à 25 600 en 2009, soit 79 MDH en valeur, d’après les statistiques de l’Office des changes.  Sur 20 millions de m2 importés et une production locale de 50 millions de m2, le volume en provenance de l’Egypte est encore faible, mais c’est surtout son évolution, à l’instar de celle des importations globales (768 MDH en 2008 et plus d’un milliard de DH en 2009), qui inquiète le plus les industriels locaux.
La crainte est renforcée par le fait que le produit égyptien est très compétitif sur le marché marocain d’autant qu’il bénéficie du démantèlement total des droits de douane (en dehors de la TVA sur importation) conformément à l’accord d’Agadir.
Cette compétitivité est en amont favorisée par le soutien de l’Etat égyptien qui «accorde aux entreprises locales une prime à l’export qui peut atteindre 15% du chiffre d’affaires réalisé à l’étranger», souligne un producteur marocain. A cet avantage s’ajoute un autre de taille : le pays est producteur d’énergie et la production locale de céramique en bénéficie largement. «Pour nous Marocains, le coût de l’énergie revient 44% plus cher par rapport à nos concurrents égyptiens», déplore Fouad Benzakour, président de l’Association professionnelle de l’industrie de la céramique.
Les producteurs nationaux ne comptent pas baisser les bras. Ils prévoient de relancer le même combat engagé depuis 2005. Cela commence par la sensibilisation des pouvoirs publics, le ministère du commerce extérieur en l’occurrence, au nouveau danger. Si la menace persiste, ils réclameront sûrement l’introduction de l’Egypte sur la liste des pays à couvrir par les mesures de sauvegarde.

11 millions de m2 seront importés de l’Union européenne au taux en vigueur

Pour le premier semestre 2010 (voir encadré), un peu plus de 7 millions de m2 franchiront les frontières marocaines en s’acquittant uniquement des droits d’importation en vigueur sans la surtaxe induite par les mesures de sauvegarde. Une quantité équivalente est prévue pour le second semestre, soit 14 millions de m2 au total et le double du contingent autorisé en 2009.
Selon la répartition établie par le ministère du commerce extérieur, l’Union européenne accapare la part du lion avec 11 millions de m2, dont 5,5 millions au premier semestre. Quelque 55 sociétés ont été autorisées à importer en provenance de cette région conformément au taux en vigueur. Conformément à l’accord d’association, il est passé de 11 à 7% au début du mois en cours. Les quantités réservées à chaque importateur vont de 1 085 m2 à 239 500 m2.
Le ministère a tenu «à se conformer à certains critères qui n’étaient pas en vigueur jusque-là», précise un responsable. Pour les importations en provenance de l’Union européenne, on a accordé 6,8% du contingent aux nouveaux importateurs. La répartition a été faite à parts égales dans la limite des quantités demandées. «En procédant ainsi, on voulait s’assurer que les opérateurs recourraient à des importations pour leur propre compte et non pour servir d’intermédiaires», explique ce responsable.
Pour les Emirats Arabes Unis, le contingent porte sur 916 500 m2. Huit sociétés ont été sélectionnées pour en bénéficier. Les quantités attribuées vont de 6 110 m2 à 783 729 m2. Pour ce contingent, le ministère du commerce extérieur a d’abord réservé «2% du volume aux nouveaux importateurs à répartir à parts égales». Le reste, il l’a réparti entre les anciens importateurs «au prorata des réalisations des trois dernières années et en tenant compte des taux de réalisation des quantités accordées durant le 2e semestre 2009». Cette répartition est motivée par le fait que la plupart des importateurs ont tenu leurs engagements en 2009.
Quant aux importations en provenance de la Chine, elles ont été limitées à 550 000 m2 répartis entre 41 sociétés à des quantités comprises entre 4 950 m2 et 172 864 m2. Les critères retenus dans la répartition ont pénalisé les importateurs qui n’ont pas pu tenir leurs engagements durant l’année dernière. C’est ainsi que 18% ont été réservés, à parts égales, à de nouvelles sociétés. Quant aux importations en provenance de la Tunisie, le contingent a été fixé à 91 500 m2 qui seront confiés à 17 sociétés dont 20% nouveaux importateurs.