Le schéma de la réforme de l’Agriculture

Les ORDAR (Offices régionaux de développement agricole et rural) remplaceront les ORMVA (Offices de mise en valeur agricole)
Des directions régionales seront créées pour décharger les directions centrales de certaines missions régaliennes
Les périmètres irrigués seront donnés en gestion déléguée à  des filiales qui auront le statut d’entreprises commerciales.

Le ministère de l’Agriculture met les dernières retouches à  son projet de restructuration en prévision de la nouvelle politique agricole en préparation. Ces derniers jours, les directeurs du ministère ont multiplié les contacts et lancé les concertations, notamment avec les syndicats, en vue de mettre en Å“uvre un projet qui traà®ne dans les tiroirs depuis des années et qu’aucun ministre n’a pu concrétiser. Mais a-t-on d’autre choix, maintenant que l’accord de libre-échange avec les USA est signé, que de changer la manière dont le secteur agricole a été géré jusqu’à  ce jour?

Une nouvelle politique agricole passe nécessairement par la refonte des organes de gestion sur le terrain avec, à  leur tête, les services extérieurs du ministère de l’Agriculture et la multitude d’administrations et d’établissements comme les Offices régionaux de mise en valeur agricole, les fameux ORMVA, et les innombrables Centres de travaux (CT).

Le projet de restructuration met l’accent sur la nécessité d’une refonte complète de l’architecture de ces établissements en proposant de revoir les attributions et les missions de chacun. Première nouveauté : la création de directions régionales de l’agriculture (DRA) qui n’ont jamais existé, les seuls services extérieurs de l’agriculture étant à  ce jour les directions provinciales (DPA). Ces dernières rendaient compte directement aux services centraux qui se trouvaient ainsi surchargés de tâches qui pouvaient être décentralisées. Partant de ce diagnostic, le projet de restructuration prévoit la création des directions régionales pour chapeauter plusieurs directions provinciales en même temps. Ces entités régionales hériteront donc de plusieurs attributions des directions centrales, notamment en matière de programmation et de gestion budgétaire.

L’Etat veut faire des ORDAR le fer de lance du développement agricole
Détail important : les directions régionales n’assureront que les missions régaliennes de l’Etat dans le domaine agricole. Les missions de développement, elles, continueront d’être confiées à  des entités autonomes. Dans l’architecture actuelle, l’action sur le terrain relève des ORMVA et des centres de travaux. Et, à  ce niveau, le projet introduit une deuxième nouveauté, à  savoir la création d’Offices régionaux de développement agricole et rural (ORDAR), qui remplaceront les actuels ORMVA. Le ministère veut faire de ces ORDAR le fer de lance du développement agricole et rural. Ils auront la charge de réaliser les programmes et les projets de développement, depuis la planification jusqu’à  la mise en Å“uvre. Mais, contrairement aux ORMVA, dont la mission est exclusivement centrée sur la gestion des périmètres irrigués, les structures prévues verront leur champ d’action élargi et le projet envisage, par conséquent, la création d’offices dans les régions o๠les ORMVA n’existaient pas.

Ils continueront, bien entendu, d’assurer les missions traditionnelles de leurs [futurs] ancêtres en matière d’aménagement hydroagricole et de mise en valeur. Mais pour ne pas refaire les erreurs du passé, qui ont fait qu’aujourd’hui les ORMVA ne rempliront plus leur mission en matière d’irrigation, les concepteurs de la réforme préconisent des solutions plus originales. C’est là  la troisième nouveauté. Il est proposé de créer des filiales, entreprises commerciales à  part entière, qui auront en charge la gestion déléguée du périmètre irrigué. Ces entreprises seront supervisées par l’office. A travers un cahier des charges et moyennant un loyer versé à  l’office, elles assureront la gestion des réseaux d’irrigation et s’assureront que les recettes de la vente de l’eau iront effectivement à  l’exploitation et à  l’entretien de ces réseaux.

Les Centres de travaux deviendront des Centres de développement agricole et des Centres de mise en valeur
Ce montage permettra de remédier à  l’un des plus grands problèmes auxquels font face les actuels ORMVA. En effet, selon les estimations du ministère de l’Agriculture, les tarifs appliqués actuellement pour l’eau d’irrigation représentent 105 % en moyenne des coûts de gestion et de maintenance des périmètres irrigués. Mais, avec le temps, les offices dont les moyens étaient limités se sont mis à  allouer les recettes de l’irrigation à  d’autres projets, ce qui a engendré la détérioration des réseaux d’irrigation et des dépenses induites, souvent importantes, pour les réhabiliter.

Mais ce n’est pas tout. Le projet de restructuration prévoit également de rattacher les Centres de travaux aux nouveaux offices dans le cadre de leurs missions en matière de développement agricole et des activités de développement rural de proximité qu’assuraient les CT auparavant. D’ailleurs, ces derniers changeront eux aussi de dénomination dans la nouvelle architecture pour devenir des Centres de développement agricole (CDA) et des Centres de mise en valeur (CMV). Il faut dire que depuis longtemps, ces CT, 122 au total, ont presque été laissés à  l’abandon, avec des moyens humains limités et des budgets rachitiques alors que, paradoxalement, ils sont censés être l’outil par excellence d’une politique de proximité en direction des agriculteurs.

A travers cette restructuration, les responsables du département de l’Agriculture espèrent avant tout mettre fin à  la cacophonie qui régnait dans le secteur. Le grand ménage s’imposait car, comme le relève le diagnostic qui a présidé à  ce projet, aujourd’hui, tous les organes publics extérieurs intervenant dans le secteur agricole s’avèrent inefficaces.