Le projet de loi sur les "bonnes" relancé : 1 000 DH de salaire minimum, congés payés…
Le projet de loi interdit le travail des moins de 15 ans et impose un contrat entre employeur et employé.
Au minimum 500 000 ménages sur les 6 millions existants disposeraient d’un employé de maison.
Le travail domestique, exercé par des petites filles ou des personnes adultes, sera-t-il enfin réglementé ? Le ministère de l’emploi et de la formation professionnelle, auteur d’un projet de loi sur le sujet, a relancé le Secrétariat général du gouvernement (SGG) pour que ce dernier mette enfin le texte dans le circuit d’adoption.
La requête du ministère de l’emploi est doublement motivée. D’une part, il s’agit d’offrir enfin un cadre juridique, même perfectible, au travail domestique, comme ne cessent de le réclamer les associations non gouvernementales ; d’autre part, il s’agit d’anticiper la réunion du Bureau international du travail (BIT) qui se réunit en juin prochain pour justement discuter d’un projet de convention internationale réglementant le travail domestique, quitte, ensuite, si le Maroc ratifie la convention qui sera élaborée, à procéder à l’harmonisation du droit national par rapport au droit international.
Il semble néanmoins que pour le SGG, un certain nombre de préalables doivent être réglés avant de lancer le processus d’adoption du projet de loi sur le travail domestique. Le premier préalable est celui de l’effectif des personnes auxquelles s’appliquera le texte une fois adopté. Autrement dit, le SGG aimerait savoir si, en l’occurrence, les travailleurs domestiques sont suffisamment nombreux pour qu’il soit nécessaire de leur confectionner une loi spécifique.
Le problème est que, à ce jour, il n’existe pas d’enquêtes officielles et sérieusement menées sur cette question. Il y a des estimations cependant. Le Fonds des Nations Unies pour la protection de l’enfance (Unicef), par exemple, estime entre 70 000 et 90 000 le nombre de «petites bonnes» au Maroc de moins de 15 ans, dont près de 14 000 dans la seule ville de Casablanca. En réalité, il n’est pas tellement ardu d’estimer le nombre d’employés de maisons (petites bonnes, femmes de ménage adultes, chauffeurs, jardiniers, etc.) : sur les 6 millions de ménages environ que compte le Maroc, on peut considérer, hypothèse basse, qu’un million parmi eux fait appel, à titre temporaire ou permanent, aux travailleurs domestiques et, au bas mot, que 500 000 ménages en disposent de façon permanente. Il existe des textes de loi qui régissent des activités où l’on compte moins de personnes !
Un corps d’assistantes sociales pour le contrôle ?
Tout le problème est de savoir, si le texte est adopté, comment en assurer l’application, ou plus exactement comment s’assurer que ses dispositions sont effectivement respectées par les employeurs. C’est le deuxième préalable soulevé par le SGG : Quel organe de contrôle mettre en place ? Le ministère de l’emploi, justement, est en train de réfléchir à la question. Faut-il faire appel à des assistantes sociales pour vérifier, in situ, donc à domicile, le respect de la loi ? Dans la mesure où il faut nécessairement, pour ce faire, pénétrer à l’intérieur des foyers, une décision de justice est-elle nécessaire ? Faut-il prévenir à l’avance de l’arrivée des contrôleurs, auquel cas la mission pourrait s’avérer infructueuse, et dans le cas contraire est-ce raisonnablement, objectivement possible? Mais quelle que soit la difficulté, un organe spécifique de contrôle devra être mis en place. Concernant le contenu même du projet de loi, il va de soi qu’il est susceptible d’amélioration, mais le fait même qu’il existe serait déjà un pas important vers la formalisation du travail domestique et donc la protection, aussi insuffisante qu’elle puisse être, de celles ou ceux qui l’exercent.
En effet, le texte fixe les tâches possibles que doit accomplir l’employé de maison (nettoyage, cuisine, baby sitting ou assistance aux personnes âgées, conduite de véhicule, jardinage, gardiennage), impose la conclusion d’un contrat entre l’employeur et l’employé, en conformité avec le dahir des obligations et des contrats (article 3), interdit de faire travailler les personnes de moins de 15 ans (article 5, alinéa 1er), fait bénéficier les employés de congés hebdomadaires et annuels, d’autorisations d’absences pour raisons familiales (mariage, décès, maladies, etc.- voir encadré). Autrement dit, il y a déjà dans ce texte, pour peu qu’il soit effectivement appliqué, les éléments de base pour le respect de la dignité humaine. Il ne faut cependant pas se faire d’illusion : tout n’est pas réglé avec ce texte et outre qu’il pourrait éventuellement être amélioré à l’épreuve justement de la réalité, il mérite aussi un accompagnement…éducatif. Mais il aura au moins le mérite d’exister.
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