Gaz nocifs, industries dangereuses… Alerte à la pollution à Casa

Les émissions de gaz polluants dépassent les normes de l’organisation mondiale de la santé et de l’Union Européenne.
Les principales industries dangereuses sont concentrées dans
les zones industrielles de Aïn Sebaa-Hay Mohammedi et de Sidi Bernoussi-Zenata.
Casablanca n’est pas aussi polluée que des métropoles comme Mexico, Bombay ou Paris. Doit-on s’en réjouir ? Non, car si rien n’est fait, on risque de se retrouver devant une situation très compliquée. Dans une étude consacrée au schéma de référence du littoral de la ville, l’Agence urbaine tire d’ailleurs la sonnette d’alarme, en particulier pour la partie Est, du Port vers Mohammédia, qui abrite deux zones industrielles, en l’occurrence celles de Aïn Sebaa-Hay Mohammedi et de Sidi Bernoussi-Zenata.
Cet état de fait est confirmé par les mesures de la pollution de l’air prises récemment par la Météorologie nationale. Il est ainsi prouvé que le quartier de Aïn Sebâa présente une situation environnementale critique, en particulier pour ce qui est des émissions de dioxyde de souffre (S02), qui provient de la combustion des carburants fossiles dont le fuel, le charbon et autres gasoil et essence. Selon le dernier bulletin publié par cet organisme, en juin, on relève que les émissions de SO2 dépassent parfois les normes de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) et de l’UE. Par exemple, le taux de S02 relevé le 2 juin 2005, au niveau du quartier de Aïn Sebaâ, était de 300 microg/m3 soit près de trois fois la norme OMS qui est de 125 microg/m3, et deux fois la norme UE qui est de 150 microg/m3.
Une situation assez inquiétante est aussi constatée pour ce qui est de l’ozone (O2), molécule résultant d’une série de réactions complexes entre les oxydes d’azote et les composés organiques volatils, initiée par le rayonnement solaire. Durant les journées du 1er, 7, 13 et 19 juin, la norme OMS qui est de 65 microg/m3 a été allègrement dépassée. Il est aussi relevé que la pollution pétrochimique se situe quelquefois au-dessus des seuils requis pour la protection de la santé (180 microg/m3). Idem pour les poussières.
L’Etat privilégie la sensibilisation à la répression
Si on en est arrivé là, c’est parce que ces zones qui sont aujourd’hui pointées du doigt ne sont pas dotées d’infrastructures spécifiques (centres de traitement et d’incinération des déchets industriels, entre autres) destinées à neutraliser les effets néfastes des déchets – liquides et solides – et des émissions de gaz sur l’environnement, alors qu’elles concentrent des activités fortement polluantes à l’instar de la chimie parachimie (engrais, peinture, pneumatiques…). L’absence de tels équipements fait qu’une très grande partie des déchets industriels est éliminée avec les déchets ménagers avec des conséquences sur le milieu naturel, dont la pollution des eaux souterraines et de surface via les décharges.
Pour ne rien arranger, les effluents liquides, à de très rares exceptions près, sont dirigés vers les réseaux d’assainissement collectif et sont directement rejetés en mer à travers cinq collecteurs, sans traitement préalable. Dans cette partie de la ville, le littoral souffre de l’absence d’une station de traitement des eaux usées.
Autre cause de la pollution atmosphérique : le trafic routier intense aggravé par les mauvaises conditions de circulation et par un parc de véhicules souvent ancien et mal entretenu
Pour corser le tout, il y a aussi les risques technologiques majeurs relevés dans l’étude de l’Agence urbaine. Ces risques sont fortement représentés sur le bord de mer où l’on recense, à côté des industries chimiques, des dépôts de gaz, des installations de réfrigération utilisant l’ammoniac et bien d’autres aires de stockage de matières dangereuses.
En définitive, les experts qui ont mené l’étude de l’Agence urbaine estiment que la situation des zones industrielles près du littoral apparaît comme la résultante d’une erreur de planification, puisque le développement industriel au long du littoral obéit a un plan dit Ecochard, conçu entre 1950 et 1952. Le mal est fait, mais il est toujours possible d’inverser la tendance, ou tout au moins de la contenir. Des moyens légaux existent. Trois lois ont en effet été promulguées en 2003. Il s’agit de la loi relative à la protection et la mise en valeur de l’environnement, celle portant sur les études d’impact sur l’environnement, et celle concernant la lutte contre la pollution.
Pour le moment, l’Etat semble privilégier la sensibilisation, avec le fonds de dépollution – encore insuffisamment sollicité – comme moyen d’encouragement, à la répression. Pour combien de temps encore ?.