Comment Facop a pu surmonter les obstacles

L’entreprise emploie plus de 200 salariés et réalise actuellement un chiffre d’affaires de plus de 200MDH. Au début, le promoteur a été obligé d’hypothéquer un bien immobilier pour avoir le crédit. Il a remédié au manque d’encadrement par l’expérience acquise préalablement dans le secteur de la peinture.

Quand Ahmed Hjiej, directeur général de Facop, fabricant et distributeur de peinture, se remémore du lancement de son entreprise en 1987, il n’omet surtout pas d’évoquer les difficultés qu’il a rencontrées à cette époque. Quelque part, la réussite de son projet a été le fruit d’une démarche proactive qui lui a permis de surmonter les obstacles et rembourser son Crédit Jeune Promoteur (CJP). En tenant en compte le nombre de ses employés, passé de 7 salariés en 1987 à 280 aujourd’hui, et le volume de son activité (200 MDH de CA en 2018), tout semble indiquer que son expérience est un marqueur du CJP. Mais elle ne doit pas être prise comme un exemple, dit-il en substance. Ayant, au départ, été obligé d’hypothéquer un bien immobilier pour obtenir le crédit octroyé par le CIH, il a pu capitaliser sur les dix ans d’expérience accumulés avant de lancer son propre projet. «Déjà au début, il était difficile d’obtenir un CJP sans piston et sans intermédiaire. Personnellement, j’ai déposé quatre dossiers dans quatre banques différentes et c’est le CIH qui a accepté ma demande, moyennant l’hypothèque de ma maison, dont la valeur équivalait au crédit», nous explique-t-il. Cette mesure particulière a poussé M. Hjiej à considérer ce prêt comme étant un crédit normal et non un CJP.

Il faut d’abord avoir un vrai projet

Une réussite ne veut absolument pas dire que le projet CJP est, en rétrospective, sans failles. Pour Ahmed Hjiej, le manquement essentiel était l’absence d’encadrement dont auraient pu bénéficier les jeunes promoteurs. «Effectivement. Après avoir contracté un CJP, le jeune promoteur est livré à lui-même. Personne ne vient vous voir pour faire le suivi ou s’assurer que le projet se porte bien, tant que le paiement du prêt est fait», souligne M. Hjiej. Cette absence d’encadrement suppose également l’absence de contrôle, ce qui mène à une seule conséquence : la réussite ou l’échec dépend entièrement de l’entrepreneur lui-même. De toutes les manières, les jeunes promoteurs ayant réussi se comptent sur les doigts. Tous représentent une minorité d’entreprises qui, selon Ahmed Hjiej, ont réussi in fine à rembourser leurs dettes. Facop a même anticipé le remboursement de ses dettes pour pouvoir changer de banque cinq ans après sa création. «Notre banque n’a pas pu suivre le rythme de notre expansion. Notre dossier a donc été récupéré par Société Générale», a-t-il déclaré.
Actuellement, l’entreprise est restée concentrée sur le même corps de métier. Evidemment, le développement d’activité a nécessité une grande diversification et un changement de local pour contenir le volume de production. Sise à Nouaceur, l’usine, construite sur une superficie de deux hectares, n’a rien à voir avec l’unité du départ de 1000 m² seulement. «Tout s’est agrandi avec le temps: la superficie de l’unité de production, le chiffre d’affaires, le personnel, etc. Je ne le répéterai jamais assez. Nous avons réussi car nous étions expérimentés. Il y a aussi un élément important qui est celui de l’honnêteté. Nous avions présenté un vrai projet, contrairement à plusieurs dossiers», martèle le directeur général de Facop.

Par honnêteté, M.Hjiej attire l’attention sur un constat soulevé par plusieurs analystes : le CJP a bénéficié à des projets de professions libérales qui se sont avérés, à tout le moins, de très mauvais payeurs. Une remarque partagée par l’économiste Larabi Jaidi (voir point de vue). «C’est ce que nous avons remarqué au départ. Le crédit JP a servi à tout sauf à financer les projets et payer les dettes. Cela a nui gravement à toute l’expérience du CJP», souligne-t-il.
Quoi qu’il en soit, cette expérience a été très instructive. L’encadrement et le conseil, à assurer par les professionnels, les banques et l’Etat, devraient être une condition sine qua non au lancement de tout projet de création d’entreprise par des jeunes. «Sans cela, on perdrait du temps», conclut M. Hjiej.

«Que ce soit dans les services ou la production, l’accompagnement est primordial»

Il n’y a pas de données récentes concernant le projet de Crédit Jeunes Promoteurs. L’arsenal juridique, quant à lui, a été renforcé à plusieurs reprises. En ce qui concerne les bénéficiaires, ce sont les médecins et les pharmaciens qui avaient contracté au départ le plus de CJP, ce qui a fait qu’une grande concentration des professions libérales s’est produite au début. Ces entreprises avaient des problèmes de nantissement et de garantie. Résultat, plusieurs bénéficiaires n’ont pas remboursé, ce qui a donné lieu à un moratoire. On s’est également retrouvé dans une situation d’iniquité vis-à-vis des autres projets qui ont pu régler leurs dettes. Ce ne sont pas les seules raisons pour lesquelles ce projet n’a pas été une grande réussite. Le manque d’encadrement a été la défaillance majeure dont ont souffert les jeunes promoteurs. Cela vaut pour celles et ceux qui ont créé une entreprise. Pour les professions libérales, cela a été différent. Que ce soit dans les services ou la production, l’accompagnement est primordial.