Parentalité en entreprise : comment fonctionne le système danois

La société danoise valorise les engagements familiaux à  travers un ensemble de mesures légales et procédurales. Contrôles, évaluations annuelles sur les questions de motivation et de bien-être, conseillers de famille en entreprise, autant de garde-fous pour la pérennité du système.

Invité par l’Association «Bébés du Maroc» à la première journée de réflexion sur la parentalité en entreprise à Casablanca dernièrement, j’ai partagé mon expérience pratique au sein d’un organisme danois qui valorise les engagements familiaux à travers un ensemble de mesures légales et procédurales. Cependant, on peut avoir toutes les bonnes intentions du monde, et c’est aussi un point que j’ai mis en avant, il faut qu’il y ait un système de garde-fous pour s’assurer que tout cela fonctionne.

De ce fait, le sujet peut être abordé sous trois angles. D’abord le Flex-time, ou horaires flexibles, le congé parental et, enfin, la flexicurité, qui suppose un dosage entre flexibilité et sécurité.  

Le Flex-time donne la possibilité au salarié d’aménager ses horaires de travail à sa guise. Il peut par exemple commencer vers 9h 00 ou 9h 30 et quitter plus tard. Mais aussi travailler plus d’heures afin de finaliser des dossiers et récupérer sur ses tranches horaires. Il faut noter qu’on est dans une logique de volontariat.   

Cette flexibilité permet au salarié, et particulièrement en cas d’obligations familiales, de disposer de temps libre pour sa famille quand l’activité de l’entreprise est au plus bas. L’important c’est de s’arranger pour respecter les horaires de travail légaux. Cette flexibilité a un impact positif sur la vie familiale de l’employé et des retombées immédiates sur son rendement.

En ce qui concerne le congé parental, la démarche est modulable en fonction des parents. La loi danoise prévoit 52 semaines dont les dix dernières peuvent être partagées entre le père et la mère. Le père dispose de 15 jours de congé paternel. Cette possibilité de partage du congé permet au couple de s’arranger pour plus de souplesse sans pour autant imposer à la mère des choix douloureux.

Et enfin, la flexicurité est un concept danois qui permet le licenciement et l’embauche facile des employés tout en leur assurant une protection sociale ainsi que le recours à la formation continue pour leur permettre de trouver un nouvel emploi.

Autant dire que la majorité des entreprises, l’Etat et le citoyen danois adhèrent à une philosophie du bien-être social et de flexibilité donnant un sens à la vie familiale, et plus particulièrement aux enfants un statut assez élevé et de haute importance publique. Cela a été confirmé par les études sur le bien-être qui ont classé les Danois comme «peuple le plus heureux du monde» depuis plusieurs années déjà.

Le comité pour l’environnement du travail a pour objectif de conseiller le management sur les bonnes pratiques

Ceci dit, des mesures s’imposent pour assurer la pérennité du système. Comme toute démarche, il faut mettre des garde-fous. J’en cite quelques-uns.

Le secteur public danois est sujet à des contrôles et des évaluations annuelles sur les questions de motivation et de bien-être des employés, de fidélisation mais aussi de respect par l’employeur d’un environnement sain de travail. En effet, un leader danois n’aimerait pas voir son unité ou entreprise en bas de l’échelle des évaluations.

Deuxièmement, des entreprises publiques disposent de conseillers de famille qui soutiennent les employés ayant besoin d’orientation pour concilier leurs responsabilités professionnelles et familiales. On trouve aussi, quelquefois, des médiateurs qui interviennent entre l’entité et ses employés.

Et enfin, et c’est assez récent, la mise en place du Comité pour l’environnement du travail permet de conseiller le management sur les bonnes pratiques pour développer un environnement de travail dépourvu de facteurs de stress et priorisant la santé et le bien-être. Derrière tout cela se trouve une histoire. Les pays scandinaves, et plus particulièrement le Danemark, ont connu des mouvements féministes parmi les plus anciens en Europe. Par exemple, les féministes danoises ont œuvré entre 1850 et 1860 à l’abolition progressive de la vision patriarcale du mariage. La tradition syndicale est aussi très forte dans ce pays d’un peu plus de 5 millions d’habitants.

Aujourd’hui, avec une grande proportion d’égalité homme/ femme à la maison et au travail, la prise en charge par les crèches, ou par un système de babysitting, touche plus de 90% des enfants âgés de 3 à 6 ans au Danemark. Un pays où la participation des femmes au marché du travail est parmi les plus élevées en Europe.