Le management des compétences : le début d’une nouvelle histoire !

Compétences individuelles, collectives et organisationnelles, toute démarche de management des compétences consiste à  travailler parallèlement sur les trois niveaux, de manière systémique et cohérente.

Avant, dans la conception dite «taylorienne» de la compétence, la problématique du management de celle-ci se posait d’une manière relativement simple. Le descriptif de poste précisait le «prescrit» de la fonction occupée, le collaborateur était appelé à respecter scrupuleusement les zones de responsabilité et d’autonomie de celui-ci, l’évaluation individuelle portait essentiellement sur les savoir-faire opérationnels et relationnels de la personne, le manager assurait un contrôle de la performance atteinte dans les limites du poste concerné, la GPEC était un exercice quasi mathématique et la formation consistait souvent en un simple transfert de savoirs, au pire, de savoir-faire, au mieux.

Aujourd’hui, l’histoire n’est plus la même. Les entreprises, confrontées à la complexité et aux évolutions fréquentes de leurs environnements tant internes qu’externes, prennent de plus en plus conscience, d’une part, que les enjeux «compétence» représentent la composante majeure de la performance et, d’autre part, que les solutions RH en la matière mises en œuvre jusqu’à aujourd’hui ne permettent plus de relever les nouveaux défis avec la performance souhaitée, voire indispensable.

Les enjeux ont à un tel point évolué, qu’il ne s’agit plus d’«aménager» les solutions existantes, mais bien d’«oser» le changement, la transformation, sous peine de perdre cette guerre au profit de ses concurrents. 

La nouvelle «histoire compétence» s’écrit, de manière très schématique, sur la base de trois «paradigmes» majeurs:

1. La compétence individuelle est à considérer comme un «savoir agir performant» résultant d’une combinatoire propre à chaque personne de différentes «ressources» mobilisées dans l’action et dans un contexte spécifique. Ces «ressources» sont de différentes natures telles que les savoirs, savoir-faire «métier» et relationnels, attitudes, comportements, qualités personnelles, réseaux, systèmes de valeurs, dynamiques de mobilisation à l’action, etc. Ces composantes de la compétence ne sont donc pas «la compétence» mais uniquement des fragments nécessaires à celle-ci. L’évaluation ne porte dès lors plus uniquement sur le degré de présence de ces ressources chez une personne, mais bien sur sa capacité à les mobiliser de manière performante dans l’action. Le paradigme devient celui du mode de fonctionnement du collaborateur, de sa dynamique personnelle d’excellence indiquant la nécessité d’un regard nouveau par rapport à un bon nombre de dispositifs et dynamiques RH tels que :

le descriptif de poste ne sera plus uniquement une «liste» de compétences «ressources» nécessaires mais décrira de la manière la plus affinée possible la «dynamique compétence», la «combinatoire ressources» nécessaire pour répondre aux «enjeux» majeurs de la fonction. Le mode de fonctionnement de la personne sera un élément-clé de l’adéquation «poste/profil».

L’évaluation de la «compétence» se fera au plus près de l’action et identifiera le «degré de confort» de la personne au sein de situations et contextes professionnels spécifiques.

les ingénieries de formation s’élaboreront autour des différentes «combinatoires ressources» possibles à mettre en œuvre pour atteindre la performance et tiendront compte que les parties «formation» proprement dites doivent absolument se compléter par des mises en situations réelles coachées par le management de proximité. La seule «évaluation» ayant sens étant «l’évaluation à froid» qui mesure les compétences développées ou renforcées. La formation devient ou redevient «apprentissage» faisant appel à certaines formules telles que le coaching, individuel ou collectif, ou encore le tutorat.

la compétence managériale accordera une large place à la capacité du manager à «construire, développer, valoriser, optimiser ou encore renforcer» les compétences individuelles de ses collaborateurs.

2. La compétence collective, à savoir le «savoir-agir ensemble», n’est pas la simple addition des compétences individuelles en présence, mais bien une forme d’«alchimie» faite de flexibilité, de coopération et de convivialité qui magnifient cette addition. Elément majeur de la capacité de changement et d’évolution d’une organisation, la compétence collective est aujourd’hui à considérer de manière prioritaire car elle représente une source puissante de création d’avantages concurrentiels. Dans ce sens, elle est au cœur de tout plan directeur de développement des compétences d’une organisation. Fruit d’une dynamique d’émergence qu’il s’agit d’initier, de nourrir et piloter, la compétence collective se développe au sein des environnements culturels et organisationnels spécifiques à «l’entreprise apprenante», dont, à titre d’exemples :

un management aux attitudes et comportements encourageant et facilitant l’apprentissage dans et par l’action ;

une appropriation effective par l’ensemble des acteurs des «valeurs» et comportements associés qui engendrent de la coopération, de la convivialité et de la solidarité ;

une dynamique et des dispositifs RH qui rendent chaque collaborateur «acteur» de son développement et évolution ;

un système de partage de l’expérience, de résolution commune de problèmes, de réflexion continue d’amélioration, de capitalisation et transfert des compétences ;

une importance majeure donnée au développement personnel des collaborateurs et au développement de leurs intelligences comportementales ;

un leadership des cadres dirigeants accordant un «sens stratégique» à l’évolution des compétences des hommes et des équipes et à leurs capacités à être des forces de propositions ;

une dynamique et des dispositifs d’identification, reconnaissance et valorisation des talents, ressources et potentiels de l’ensemble des collaborateurs.

3. La compétence organisationnelle dont une composante essentielle est «l’intelligence collective» développée au sein de l’organisation. Celle-ci consiste à permettre à chaque collaborateur de s’approprier et traduire, à son niveau, les éléments-clés de l’ambition et du projet global de l’entreprise. D’une toute autre nature que la fixation d’objectifs individuels propre au système «MBO»,  l’intelligence collective s’inscrit dans une dynamique «émotionnelle» permettant de construire de la fierté, de l’ambition commune et un sentiment d’appartenance à un projet au sein duquel chacun a un rôle indispensable à jouer. Le partage de valeurs réellement considérées comme un moteur de mobilisation collective donnant sens à l’action globale est un levier important de construction d’intelligence collective. Le «cœur de contenu» de l’intelligence collective est composé des éléments-clés du «projet d’entreprise» de l’organisation à construire, ou, au minimum, à décliner par des approches collaboratives, souvent ludiques dans leur mise en œuvre. Les actions de team-building auront, dans ce cadre, un véritable sens.

En conclusion, l’essentiel est de comprendre que les «paradigmes de la compétence» ont fortement évolué, que les solutions mises en place jusqu’à aujourd’hui en matière de management et développement des compétences ne suffisent plus pour répondre aux nouveaux enjeux «compétence», mais qu’il existe de «nouveaux champs du possible» en la matière qui mettent les Hommes, équipes et organisations «en mouvement». Sans oublier qu’en matière de management des compétences, il en est de même pour le «marketing mix» : la performance finale sera dépendante de la stratégie la plus faible. Le projet consiste dès lors à travailler parallèlement sur les trois niveaux de la compétence, de manière systémique et cohérente.