Expatriation en Afrique : Ali Zarhali, Consultant cabinet MCRM

«Les entreprises doivent proposer des packages motivants sur tous les plans»

Recherche de nouveaux marchés, croissance externe à l’international, l’expatriation de cadres et managers marocains en Afrique est de plus en plus  fréquente. Une tendance générée aussi par le besoin de partager un savoir-faire et une expertise marocaine, et ce, dans tous les secteurs : BTP, immobilier, nouvelles technologies, banque et assurance… Ali Zarhali, consultant Senior – CEO du cabinet MCRM Consulting, intervient dans le domaine du conseil en Afrique. Il met en exergue les principaux points à surveiller. 

On observe un fort intérêt pour les affaires en Afrique, pensez-vous que les cadres marocains sont attirés de plus en plus par cette perspective ?

Actuellement, deux principales raisons expliquent cet intérêt. Premièrement, l’Afrique est devenue le premier gisement de croissance économique mondiale et les grandes entreprises marocaines (BMCE Bank, Maroc Telecom, Attijariwafa bank, Saham…) ont été la première locomotive d’expatriation des cadres et managers marocains. Deuxièmement, les relations privilégiées qu’entretient le Maroc avec certains pays ont permis à plusieurs opérateurs économiques (y compris les PME/PMI), tous secteurs confondus, d’explorer de nouvelles niches de croissance et des opportunités de développement et de s’installer dans ces pays, voire s’étendre aussi aux pays voisins. Donc pour s’installer et suivre de près la rentabilité de leur investissement, ces opérateurs font appel en premier lieu à des cadres et managers marocains en mobilité ou nouvellement recrutés. 

Aussi, pour booster leur carrière et développer leur potentiel, leur leadership et leur capacité d’adaptation et de gestion des risques, des cadres et managers préfèrent de plus en plus passer par l’expatriation pour revenir en force à la maison mère et occuper des postes de décision et de management. L’expatriation attire et mobilise des personnes de par la nature et la pertinence des projets gérés (acquisition d’entreprises locales et mise aux normes du groupe, lancement de la marque dans un environnement différent…). Elle peut répondre à des besoins de découverte, de dépaysement et d’exploration de nouveaux pays. Malgré l’absence de statistiques officielles sur l’expatriation des cadres marocains, on peut noter que le nombre des expatriés croît d’année en année. 

 Dans quels domaines interviennent-ils le plus ?

Recherche de nouveaux marchés, croissance externe à l’international sont à l’origine d’une expatriation de plus en plus  fréquente de cadres et managers marocains. Elle concerne non seulement des postes au sein des multinationales classiques mais aussi des entreprises marocaines qui ont développé un savoir-faire et une grande expertise dans leur métier et qui apportent une valeur ajoutée en participant aux grands projets de modernisation des infrastructures (BTP, NTIC, ports, immobilier, industrie…). Les banques et les assurances sont aussi de la partie pour développer leurs réseaux au niveau continental et accompagner les entreprises marocaines qui s’exportent en Afrique. Bien sûr, il ne faut pas oublier les PME et PMI marocaines (en général des prestataires de services de conseil, informatiques, études techniques) qui sont de plus en plus présentes en Afrique pour accompagner les grands comptes marocains. 

Nous pouvons maintenant affirmer que tous les secteurs d’activités économiques (commerce, services, agriculture & agroalimentaire, industrie, santé, éducation) attirent les cardes marocains à l’expatriation en raison d’opportunités et de mobiles divers et surtout pour booster leur carrière. 

 Il est vrai que c’est difficile pour les entreprises, comment font-elles justement pour les faire expatrier?

Il faut disposer d’une stratégie claire et bien expliquée aux candidats à l’expatriation, qui englobe à la fois les objectifs de l’entreprise, la politique d’accompagnement et d’assistance sur place, l’information sur le pays d’accueil. L’accompagnement concerne aussi le conjoint et la famille. A l’instar des multinationales, des guides spécifiques doivent être élaborés et remis aux expatriés. Une formation préalable à la gestion des risques interculturels est recommandée.

En raison des spécificités économiques, politiques, et sociales des pays de l’Afrique subsaharienne et concrètement pour attirer les cadres et managers marocains à travailler dans ces pays, il faut proposer des packages motivants sur tous les plans : rémunération, assurance, santé, fiscalité, logement, transport & déplacement, sécurité et accompagnement familial (scolarité des enfants). La finalité de cette politique a pour but de réaliser les objectifs de l’entreprise (chiffres et parts de marché) et permettre au cadre ou manager de mieux vivre son expatriation. S’inspirant des pratiques des multinationales, des grands comptes marocains présents en Afrique ont développé et mis en place une véritable culture de l’expatriation. Une enquête est en cours de réalisation par MCRM Consulting pour mieux cerner les motivations et les mobiles de l’expatriation des cadres marocains en Afrique et dont les résultats seront publiés prochainement. 

 Enfin, quels sont les points à surveiller ?

Pour l’entreprise, l’expatriation est une opportunité de développement des compétences et de changement pour ces managers et ces cadres. C’est aussi un moyen pour alimenter le vivier de ses hauts potentiels. L’expatriation doit être inscrite dans le projet d’entreprise en termes de stratégie, de communication, d’organisation, d’accompagnement et d’évaluation.

Pour les expatriés, une intégration dans le pays et les entreprises d’accueil dépend de leur capacité d’adaptation et d’assimilation de la culture locale, ainsi que de leur expertise et compétences pour fédérer leurs équipes opérationnelles.

Je retiens quatre aspects dans cette démarche pour mieux vivre l’expatriation :

 Former ses collaborateurs locaux à la culture de la maison mère et assurer un transfert de compétences.

 Garder une écoute permanente et un lien étroit avec ce qui se passe dans la société mère pour mieux préparer le retour.

 Participer aux activités culturelles, sociales et économiques du pays d’accueil. S’isoler de l’environnement de l’entreprise est synonyme de stagnation et d’incapacité à changer de milieu de travail.

 Créer des liens et des relations avec les compétences locales notamment celles ayant suivi leurs études dans les mêmes écoles ou universités au Maroc et hors Maroc.