Entretiens de fin d’année : Vers des évaluations moins formelles ?

• Annulation, report ou maintien…, si, pour les entreprises organisées, le maintien des entretiens annuels est primordial, pour d’autres, en revanche, le doute plane encore.

Annulation, report ou maintien ? En cette fin, pour beaucoup d’entreprises, l’heure est aux entretiens de fin d’année. Un moment privilégié où salariés et managers évaluent ensemble les performances réalisées, les contraintes rencontrées et les challenges à venir. Sauf que cette année, l’incertitude plane encore quant à leur tenue. Si, pour certaines entreprises, le doute ne se pose pas, d’autres en revanche ont pris l’initiative de les reporter ou carrément les supprimer faute de visibilité. Pour Mohammed Benouarrek, DRH de Promamec, «c’est un rendez-vous incontournable. Les évaluations de performances se tiendront comme d’habitudes, car chaque collaborateur a des objectifs SMART basés sur des indicateurs de résultats. Ils se feront en face-à-face ou à distance si la situation ne le permet pas». Les entreprises font l’effort de s’adapter à la réalité actuelle et se préparent pour affronter des temps incertains en choisissant donc de repenser leur processus d’évaluation antérieur, et donc plus de souplesse dans le contenu, notamment en raison du contexte qui a bousculé l’activité économique et empêché l’atteinte des objectifs fixés en début d’année. Certaines ont envisagé d’adapter le processus de gestion des performances aux fluctuations propres de leur environnement. D’autres ont saisi l’opportunité pour réévaluer certaines de leurs méthodes de calcul des primes et de fixation des augmentations salariales.

Dans ce contexte, l’évaluation des performances peut s’avérer difficile à maintenir en l’état. «Cependant, il est impératif de continuer à valoriser l’engagement et les performances des employés, et de leur donner des objectifs aussi clairs que possible, quitte à les revoir pour les adapter à la conjoncture sanitaire et économique actuelle», note M. Benouarrek.

La suspension des entretiens peut générer des effets indésirables

Il faut dire que même sans la crise sanitaire quelques voix s’élevaient pour fustiger le caractère non challengeant et inéquitable des résultats de la campagne d’évaluation annuelle. Selon eux, dans beaucoup de situations le saupoudrage nivelle au même seuil de notation la majorité des collaborateurs. D’autres dénoncent le côté chronophage de l’évaluation et la perçoivent comme une corvée administrative, surtout quand l’effectif des appréciés est élevé.

Et sur ce plan, les entreprises qui envisagent de les supprimer peuvent s’attendre à quelques dysfonctionnements, car l’abandon des entretiens annuels d’appréciation peut générer des effets indésirables pour le collaborateur, pour son manager et pour l’entreprise. A commencer par le manque de feed-back du manager à son collaborateur qui est une source de démotivation et de frustration aussi bien pour les plus performants que pour le reste du personnel qui a besoin de repères pour comprendre pourquoi leurs performances sont jugées insuffisantes. L’annulation des entretiens annuels d’évaluations peut également priver les managers et les décideurs d’informations précieuses sur les réalisations et les améliorations obtenues et celles qui doivent être accélérées. Or, les dirigeants en auront besoin pour arbitrer les décisions d’investissements à faire et trancher sur l’affectation des budgets pour l’année à venir et à leur tête le budget RH des augmentations salariales, des primes, des promotions, des recrutements et de la formation. Enfin, la suspension des entretiens annuels d’appréciation entraîne une discontinuité de communication entre les collaborateurs et leurs managers, les poussant à éprouver une sensation d’isolement et de déséquilibre psychologique déjà exacerbé par les effets du confinement et de la peur d’être contaminé.

Pour Aziz Filali, DRH dans une multinationale agroalimentaire, «l’entretien de fin d’année doit au contraire donner plus de place à la parole du salarié. Il paraît ainsi nécessaire d’évoquer les particularités, afin de préserver la relation avec le collaborateur, de maintenir une bonne image de l’entreprise, et de ne pas démoraliser les salariés». Et de poursuivre : «Avec le télétravail, les équipes ont été désunies. C’est aussi pour cette raison qu’il faut inviter les managers et les équipes à s’interroger sur le regard porté sur le travail à distance lors des entretiens». Pour lui, les temps de crises offrent de réelles possibilités d’apprentissage et de développement qui peuvent aider à maintenir l’efficacité de l’organisation. Ces opportunités de développement et de formation sont un facteur clé pour générer l’engagement des salariés.