Emploi au Maroc : Avis de Khadija Boughaba, DG du cabinet Invest RH

“Il y a très peu de créations d’emplois, les entreprises n’embauchent que pour des postes existants”.

De manière générale, les programmes de recrutement sont toujours maintenus, mais les entreprises ne forcent pas. Elles embauchent pour pourvoir des postes existants, mais très peu pour des créations d’emplois. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce manque de dynamisme. On attend sur la scène internationale à ce que les affaires reprennent. Ensuite au niveau national, les programmes structurants connaissent plus ou moins quelques fluctuations.

Certains secteurs comme l’automobile et le textile sont les plus touchés, vu que les entreprises y opérant sont en grande partie exportatrices.
L’immobilier est aussi dans une situation peu commode. En revanche, les autres secteurs arriveront certainement à surmonter cette crise. Par exemple, les services continuent d’animer le marché de l’emploi. On peut citer l’offshoring et les technologies de l’information. Les banques continuent également de recruter, mais à un rythme moins important. Si la crise perdure, les conséquences vont se disséminer dans d’autres secteurs.

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Dans le secteur public, la tendance est aussi à l’attentisme. On assiste beaucoup à la rationalisation des budgets et donc à très peu de recrutement. Généralement, les besoins de recrutement sont opérés suite à des opérations de départs volontaires. Autre tendance remarquée, vu le climat difficile à l’étranger, certains cadres établis en Europe notamment n’hésitent pas à rentrer au bercail. Quant aux banques, elles continuent d’embaucher pour compenser les départs à la retraite, mais surtout pour accompagner la croissance. Pratiquement épargnées par la crise, elles ont poursuivi normalement leur programme de recrutement.

La logistique suit la même tendance. Compte tenu de la concurrence, les entreprises fonctionnent de plus en plus à flux tendus pour réduire les coûts de stockage des marchandises ou de matière première. La grande distribution a été parmi les premiers à saisir son importance. Mais, partout, le métier de logisticien est appelé à évoluer très rapidement.
Par ailleurs, de nouveaux métiers émergent. Par exemple, compte tenu des menaces qui pèsent sur la nature, l’environnement, de manière plus large, est un gros gisement d’emplois. Et il ne s’agit pas seulement de nouvelles spécialités à créer.  Des métiers classiques peuvent se transformer en métiers de l’environnement. Ainsi, un ingénieur peut devenir un ingénieur en génie de l’environnement, un juriste peut se spécialiser en droit de l’environnement…

Pour les court, moyen et long termes, les observateurs considèrent que les plans Emergence, Azur, Maroc Vert et les divers programmes d’habitat urbain sont regardés comme de puissants moteurs de création d’emplois. Il faudra quand même former et beaucoup former en axant les efforts tant sur la quantité que sur la qualité.
Enfin, ce qui rend le marché encore plus tendu, c’est l’inadéquation entre la formation et l’emploi. La plupart des recrues ont besoin d’un temps d’adaptation plus ou moins long pour être opérationnels.

Le manque d’expérience et l’absence de qualités comportementales exacerbent la rareté des bons profils, et ce, dans tous les domaines. Par conséquent, les entreprises qui rebutent à investir dans la formation choisissent tout simplement de débaucher. Cette pratique est très ancrée dans certains secteurs ou une rallonge de 1 000 à 500 DH incite beaucoup parmi le petit personnel à changer de camp.