Communication en période d’incertitude : Avis d’Omar Benaini, Consultant chez LMS ORH

Le manager doit porter un message d’espoir et faire prendre conscience à  tous que les efforts doivent être collectifs. Face à  l’incertitude, la communication est le maître mot.

Pour Omar Benaini, consultant associé chez le cabinet LMS ORH, la crise  est avant tout une opportunité pour rebondir. Comme ce qui se fait ailleurs, il faut déjà penser à l’après-crise. Explications.

Quel est votre sentiment sur la crise actuelle ?

Je pense qu’on tient deux niveaux de discours sur la question. Le premier est souvent récurrent et par conséquent alarmiste. On parle de crise comme étant une situation dramatique à tous les niveaux : macroéconomique, sectoriel, social…, ça devient caricatural et non crédible.
Le deuxième niveau de discours est beaucoup moins palpable. On est en crise mais on ne la sent pas. De ce fait, je suis surpris du peu d’intérêt que les décideurs portent à la crise alors qu’elle est présente.

Au Maroc, la communication de crise n’est pas le premier souci des entreprises. C’est quand la crise survient qu’elles réagissent pour limiter les dégâts.
Tout le monde sait que la crise peut prendre différentes facettes et il est difficile de les appréhender toutes. Elle peut être de nature humaine, commerciale, technique, informatique, environnementale,… Au-delà de la certification qualité, il est important que les entreprises se préoccupent plus de la sécurité de leurs hommes, du manager à l’ouvrier, et, bien sûr, de leurs outils de travail (machines de production, système informatique…). L’impact de l’entreprise sur l’environnement est également à prendre en compte.

Comment les entreprises vivent-elles cette période ?

Les entreprises vivent une multitude de paradoxes. Elles sont dans une logique de développement et de sécurisation des affaires mais en même temps d’optimisation et de fidélisation des ressources humaines. En fait, les managers sont souvent partagés entre la quête de performances économiques et la prise de conscience d’un mode de management moderne basé sur la responsabilité sociale de l’entreprise. Face aux  turbulences environnementales, les entreprises sont de plus en plus à la recherche de nouveaux leaders capables de s’adapter mais aussi de changer les comportements de leurs collaborateurs.

Comment cela se répercute sur les individus ?

Cela finit par créer des crises psychologiques, des bruits de couloir, des situations alarmistes si l’entreprise n’agit pas en temps opportun. Parfois même le fait de cacher les difficultés pousse les entreprises à prendre des décisions qui vont à l’encontre de la bonne gouvernance.
Même au niveau individuel, les cadres et employés se posent parfois la question de rester dans ces entreprises ou ces secteurs en mal de compétitivité.
Il faut souligner que la gestion de telles situations diffère en fonction de la culture managériale de l’entreprise. On sera plus tranquille et mieux impliqué dans la recherche d’une voie de sortie de crise dans une entreprise qui développe les relations de confiance, l’esprit d’appartenance et la responsabilisation que dans celle où la communication est inexistante.

Alors, quel discours tenir en cette période ?

Le discours le plus important est celui qui s’intéresse à la pérennité de l’entreprise. Il ne faut pas chercher à rassurer à n’importe quel prix. Le management doit apporter la preuve qu’il s’engage pleinement pour sortir l’entreprise de sa crise. Tout d’abord, la première chose à faire est de mener une réflexion profonde afin de savoir si la crise peut s’avérer comme une opportunité. On a bien vu des entreprises au bord de la faillite se ressaisir parce qu’elles ont revu de fond en comble leur mode de management.
Il ne faut pas oublier qu’il existe deux types de changement. Celui qu’on veut et celui qu’on subit. Les entreprises qui arrivent à persévérer sont celles qui sont dans le premier mode.

Deuxième point important, celui de la communication. Cela ne veut pas dire qu’il faut tenir des discours alarmistes à tout bout de champ mais plutôt être dans une logique de cohésion d’équipe. Un travail de proximité est important et le manager doit être présent sur le terrain pour garder le contact le plus étroit possible. Il doit aussi faire preuve de la plus grande transparence.
Le manager doit porter un message d’espoir et faire prendre conscience à tous que les efforts doivent être collectifs et que les solutions se trouveront dans le collectif. Il convient aussi de rappeler les principales valeurs et de fédérer les équipes autour de celles-ci.

Quelles sont les parties prenantes quand on décide de prévoir un plan de sortie ?

La direction générale, la direction de la communication, la DRH, les représentants du personnel… sont autant d’intervenants internes à l’entreprise et parties prenantes à différents niveaux du plan d’action et de communication. Il n’existe pas nécessairement une cellule de crise unique, mais différentes cellules de crise selon le type d’événement auquel est confrontée l’entreprise. Le plan de communication doit accompagner le plan d’action prévu.
 
Quelle est la stratégie à mettre en place ?

La crise, nous l’avons dit, peut toucher différents domaines. Il n’y a pas de stratégie type ou de “bonne stratégie”, si ce n’est déjà d’anticiper… En effet, les risques sont différents selon le secteur et l’activité. C’est au cas par cas et du “sur mesure”. Entreprise de fabrication et entreprise de services ne feront pas la même évaluation des risques possibles. Pour une banque, le risque prioritaire est financier, mais il est également informatique. La protection des données sensibles et des comptes clients est primordiale. Pour une entreprise industrielle, les risques sont différents d’un secteur d’activité à l’autre. Entre une entreprise chimique et une entreprise agro-alimentaire, les risques évalués ne sont pas les mêmes, même si certains peuvent être totalement similaires.