«L’ouvrage est un vrai plaidoyer pour l’amour»

L’humanisation dans la gestion joue un rôle important dans l’engagement et l’implication des employés. L’amour est porteur d’énergie au sein de l’entreprise.

Le monde dans lequel nous évoluons est marqué par l’incertitude. Dans cet environnement instable chacun a besoin de repères, de sens et de lien. A travers son dernier livre «Le leadership de l’amour», Emmanuel Toniutti, théologien, philosophe, coach et président de l’International Ethics Consulting Group montre comment développer et mettre en œuvre une démarche dans laquelle l’amour devient le point d’ancrage des comportements des leaders responsables du futur.

Pourquoi titrer votre ouvrage «Le leadership de l’amour» ?  

Loin d’être un titre provocateur, pour beaucoup d’observateurs la course effrénée à la performance rend les rapports en entreprise de plus en plus difficiles. Que faisons-nous alors au sein de l’entreprise pour «humaniser» notre mode de gestion? A l’évidence, les managers semblent comprendre que l’humanisation dans la gestion joue un rôle important dans l’engagement et l’implication des employés. Cette prise de conscience a son importance dans un contexte où les cerveaux sont mis à rude épreuve, notamment par les changements brutaux de l’environnement de l’entreprise, la concurrence, le respect des délais et des objectifs commerciaux et la peur des restructurations.

A travers ce livre, je m’inspire des grands penseurs, de mon expérience au contact de dirigeants pour montrer que le «leadership de l’amour» n’est pas seulement plus satisfaisant pour toutes les parties prenantes, il est aussi plus efficace et que le rôle économique et social d’une entreprise peut trouver un point d’équilibre s’il -et seulement s’il – existe une relation d’amour sincère entre les parties prenantes.

Quel message délivrez-vous à travers ce livre ?

Le principal message consiste à dire qu’au-delà de toutes les stratégies qu’on peut mettre en place, c’est l’être humain qui doit être placé au cœur de l’organisation. Une entreprise réellement humaine, c’est celle qui place également la satisfaction et l’épanouissement de ses équipes au centre de ses préoccupations, et ce, avec authenticité et sans démagogie. Par exemple, en cherchant à insérer le projet personnel du collaborateur dans la vision globale de l’entreprise, en ayant un système de reconnaissance de la performance juste et transparent, en communiquant clairement et en vivant réellement au quotidien des valeurs. Une entreprise humaine est une entreprise qui inspire ses équipes et, ainsi, qui gagne leur engagement…

J’emploie volontairement le mot amour parce que j’estime que dans le sens du respect de la différence de l’autre, l’amour est porteur d’énergie au sein de l’entreprise.

Vous voulez dire que l’amour a sa place dans l’entreprise ?

Tout à fait ! Tout comme la reconnaissance, l’équité, l’amour a donc bien sa place au travail et rend les rapports plus humains. Ce n’est donc pas un hasard si les experts en management ont encouragé les incentives ou séminaires d’entreprises pour construire ou renforcer des liens entre collègues ou au niveau de toutes les lignes hiérarchiques de sorte à créer des synergies, même si l’objectif n’est pas de susciter une véritable amitié. Tout cela pour dire qu’une bonne ambiance facilite les initiatives, renforce la solidarité et favorise la performance. Cependant, la proximité doit être vécue au quotidien. Rien ne sert d’afficher des chartes de valeurs si on ne se montre pas proche des collaborateurs.

Comment les faire vivre justement ?

Je répondrai par un cas concret. Il y a 4 ans, j’étais appelé par un dirigeant d’une entreprise française dont la problématique se rapportait à l’éthique et valeurs : «Comment devenir une entreprise aimée par ses clients et collaborateurs?», me suggérait à l’époque le PDG de ce groupe. Tout l’enjeu a été au départ de définir les valeurs de ce groupe. On a commencé par faire une thérapie de l’entreprise en revisitant son histoire, ses rites et ses coutumes, en appliquant la méthode d’analyse des civilisations et cultures utilisée en théologie pour dégager justement les valeurs de l’entreprise.  

Mais ce n’est pas tout. Faire vivre des valeurs nécessite également le leadership responsable du manager. Je m’explique. Un leader peut briller par son charisme, ses compétences, son pouvoir d’attraction…, il a souvent tendance à penser que l’énergie ne vient que de lui alors que le leader responsable a certes une énergie intrinsèque à lui-même mais qui reconnaît qu’il a aussi une énergie qui vient de l’extérieur, c’est-à-dire de son environnement, de son entourage…
Et donc, in fine, le manager doit y croire pour faire vivre ces valeurs mais il doit aussi pouvoir faire adhérer les autres grâce à son leadership.