Au Royaume
La solution qui pose problème
En mettant en place des prix d’alerte, il ne faudrait pas tolérer le moindre retour au protectionnisme. Il y va de l’intérêt du Maroc et de sa crédibilité.
Les mesures envisagées par le gouvernement pour combattre la fraude à l’import font craindre à juste titre un retour du protectionnisme déguisé. Bien entendu, le gouvernement oppose les dénégations les plus indignées à de telles accusations. Mais le système qu’il a décidé de mettre en place crée plus de problèmes qu’il n’en résout.
Le problème que les prix d’alerte sont censés combattre est celui de la fraude. C’est-à-dire que des importateurs déclarent une valeur inférieure à la valeur réelle, de sorte à payer des droits de douane moins élevés.
Pour les producteurs locaux, et ils ont bien raison, c’est un cas avéré de concurrence déloyale. Pour l’Etat, ce sont des recettes douanières en moins et, au train où va le déficit budgétaire, il en a bien besoin.
Mais aucune étude n’a été faite pour tenter de mesurer l’ampleur du phénomène. Le seul indicateur dont nous disposons est d’ordre statistique: si la fraude avait été réellement massive, les recettes douanières auraient baissé. Il n’en est rien.
La deuxième remarque que cette initiative gouvernementale inspire, c’est la complexité du système que l’on envisage de mettre en place, ainsi que son iniquité.
Ce sont en effet les producteurs locaux qui doivent déterminer quels sont les prix d’alerte, en dessous desquels l’importateur est suspecté de fraude et sommé de s’expliquer.
Sur quelle base le feront-ils ? On n’en sait rien ; mais ce qui est sûr, c’est que les commissions qui détermineront ces prix d’alerte sont composées de douaniers et d’industriels locaux, c’est-à-dire deux catégories ayant intérêt à ce que ces prix soient les plus élevés possible.
Enfin, ces prix d’alerte risquent, à l’usage, de se transformer en prix de référence et on se demande ce qu’en penserait l’OMC.
En optant pour la mise en place d’une usine à gaz, on ne sait pas trop si le gouvernement avoue son incapacité à lutter contre la fraude à l’import ou s’il obtempère aux pressions des lobbies.
Nous avons aujourd’hui un gouvernement qui augmente les salaires, diminue la durée du travail, creuse le déficit budgétaire au lieu de prendre et de rechercher toutes les mesures susceptibles d’améliorer la compétitivité de l’économie et la productivité des investissements.
Dans la mise en place du système de prix d’alerte, la vigilance est de mise. Il ne faudrait pas tolérer le moindre retour au protectionnisme. Il y a va de l’intérêt du Maroc et de sa crédibilité