Au Royaume
Il commence par fabriquer des maillots de bain avant de cartonner dans l’immobilier
A 24 ans, alors étudiant, il fait son coup d’essai en achetant deux taxis à New York : un échec.
En 1989, il achète une entreprise
de fabrication de bouchons de champagne qu’il revend dix ans
plus tard.
En 1999, il se lance dans l’immobilier avec Sakani et Eden Island.

Abdallah Slaoui n’est pas un homme qui passe inaperçu. Séduisant, athlétique, le sourire charmeur, la mine joviale, c’est l’exemple même du personnage équilibré et rassurant. Mais Abdallah Slaoui est un faux calme, l’esprit en constante effervescence, il est en permanence dans la résolution d’un problème ou l’élaboration d’un projet. Son parcours en témoigne, tant il est jalonné par la recherche de la performance et, parfois, de l’exploit. Tour à tour skieur, triathlonien, marathonien, il s’essaiera au sport où il fera de la compétition par plaisir mais sûrement, même s’il s’en défend, par besoin d’affirmation de soi et de reconnaissance de son talent. Quoi qu’il en soit, le fils du défunt conseiller de Hassan II n’avait pas de raisons spéciales de se destiner à la vie mouvementée et minutée du brillant homme d’affaires qu’il est devenu.
Ingénieur télécoms, master en finance
Né à Casablanca en 1960, il va vivre à Rabat dans une famillede deux enfants – il a une sœur – avant de revenir habiter dans la capitale économique,où il va fréquenter le lycée Lyautey. Il n’y resterapas toutefois jusqu’au Bac. Deux ans avant l’échéance,son père, soucieux de lui assurer une formation de pointe, va l’inscriredans une école aux USA, alors qu’il n’a que 16 ans. Il y apprendra à comptersur lui-même. Le Bac en poche, c’est à l’université dePennsylvanie, à Philadelphie qu’il s’inscrit pour faire des étudesd’ingénieur télécoms, complétées parun master dans la même spécialité. En 1984, c’est leretour au bercail et le service civil qui l’attend. Il s’initie auxquestions budgétaires au sein du ministère des finances. Mais ilest résolu à travailler pour son compte.
Le jeune Slaoui a-t-il trop pris goût aux finances ? Son service civilachevé, il décide de retourner étudier aux USA, à l’université deColumbia, à New York, où il décrochera un master… en financejustement. Tenté un moment par une aventure à Wall Street, avecun goût prononcé pour le conseil en fusions-acquisitions, il finirapar rentrer au pays en 1987.
En fait, reconnaît Abdallah Slaoui (de son nom complet Abdallah Jawad Slaoui),il a toujours été attiré par le monde des affaires. Et cen’est pas un hasard s’il s’y est frotté trèstôt. En effet, alors qu’il était encore à New Yorkpour ses études, il s’associe à un condisciple pour acheterdeux taxis et en assurer la gestion. Il n’avait alors que 24 ans et l’affaireavait failli tourner au vinaigre, avec des chauffeurs aux méthodes peuorthodoxes en matière de gestion de la caisse.
«Dans un échec, les enseignements tirés doivent figurer auchapitre des bénéfices»
Abdallah Slaoui est un fonceur car, dit-il, «si je réussis, c’estdans l’ordre des choses, sinon j’aurai autant de bénéfice à tirerparti de mes erreurs, ce qui me permettra de rebondir. L’échec nem’a jamais fait peur et je ne serais pas étonné que ce soitlà une des raisons de mes réussites».
Dès qu’il rentre au pays, en 1987, Abdallah Slaoui crée,avec un associé, une entreprise de confection de maillots de bain. Ily met 50 000 DH et un crédit que lui octroie une banque. L’affairene marche pas si mal, mais au bout de trois ans, il s’en lasse et revendses parts à son associé.
La chance de sa vie fut une affaire française qu’il finançagrâce à des fonds de garantie européens
C’est alors qu’il va s’essayer à l’immobilier.En effet, fort du produit de la vente de la petite unité de confectionde maillots de bain, il achète son premier terrain à Sidi Moumen, à Casablanca,qu’il lotit grâce au financement de sa banque et d’un tourde table d’actionnaires. Au total, ce sont 5 millions de DH qu’ilmobilisera uniquement pour l’achat. Mais, il est encore loin de son rythmede croisière, le domaine de l’immobilier étant hautementcapitalistique.
C’est alors que s’offre à lui la chance de sa vie. Aprèsavoir racheté une petite usine de fabrication de bouchons, il lorgne uneunité française dans le même secteur, Sibele, qu’ilachètera grâce à des fonds de garantie européens.Une affaire en or dont il s’occupera, qu’il fera fructifier entre1989 et 1999, tant et si bien qu’il créera des filiales en Espagneet au Portugal. Voici comment il résume l’épisode qui l’apropulsé dans le monde des affaires : «Je ne prendrais pas, aujourd’hui,les risques que j’avais pris à l’époque. Il se trouvequ’au moment où je l’avais revendue en anticipant sur certainesdifficultés à venir, Sibele fabriquait un bouchon sur quatre pourla production de champagne dans le monde». Du produit de cette vente, AbdallahSlaoui ne dira pas un mot. Mais c’est à partir de là qu’ilprit son envol dans le monde de l’immobilier – qu’il avait commencé à investirdès 1993 – avec son groupe Jascom. Jascom, après avoir investidans l’immobilier économique avec 2 500 logements produits sousla marque Sakani, se lance aujourd’hui dans l’immobilier de luxeavec le projet Eden Island.
De fait, Abdallah Slaoui est un touche-à-tout – il a même tenté l’éditionavec le magazine Masculin – mais toujours avec une grande prudence. Celle quipermet de rebondir, d’anticiper sur les difficultés, mais jamaisd’y laisser plus que quelques plumes. C’est la règle, on nepeut toujours gagner, mais, dit-il, «les enseignements qu’on peuttirer de ses erreurs doivent figurer dans le compte bénéfices,c’est une certitude pour moi». Aujourd’hui, son terrain deprédilection déclaré est l’immobilier.
C’est là, dit-il, qu’on peut faire des affaires, et c’estaussi un secteur qui s’est professionnalisé de manière rapideet plutôt satisfaisante.
