Au Royaume
Enfin, les mentalités changent !
Au lendemain de son élection à la présidence d’une des douze Régions, on aura entendu cette grande figure d’un parti connu faire aux médias une déclaration dans laquelle notre nouveau président affirmait qu’il aurait souhaité ne pas être porté à ce fauteuil qu’il considère comme une «très lourde responsabilité» et qu’il a peur de ne pas pouvoir honorer la confiance des citoyens.
Sur un ton, qui paraissait en tout cas très sincère, notre homme s’est solennellement engagé en public à déposer sa démission le jour où, dit-il, il se rendrait compte qu’il était plus là pour faire la parade, pour se prendre en photo que pour servir l’intérêt de sa Région et des citoyens.
Un jeune élu d’un autre parti, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, a voté, lui, de manière illogique entre la Région et la commune. La veille, il donnait sa voix pour un candidat à la présidence d’une région en dehors de l’alliance traditionnelle de son parti et à l’encontre des consignes de sa direction. Mais le lendemain, pour les élections à la mairie, on le voit apporter son soutien au candidat du camp opposé. Etonnant, non? Pourtant quand on pose la question à l’intéressé, il donne une réponse implacable et peut-être même rassurante. Notre homme explique, en effet, qu’«[il] a voté pour les personnes qu’[il] estimait avoir le profil convenable pour servir l’intérêt général et celui des citoyens quand bien même elles seraient dans le camp adverse».
Et bien entendu, personne n’a raté cette sortie tonitruante du patron d’un grand parti d’opposition, pourtant grand perdant de ces élections, pour annoncer publiquement qu’il se rangeait du côté de la majorité en adoptant, dit-il, le soutien critique.
Au lendemain des élections des présidents des Régions et des communes, on a entendu çà et là des voix s’élever et dénoncer des alliances contre-nature entre partis de majorité et d’autres de l’opposition.
Mais en fait, n’est-ce pas là, au contraire, le signe d’un grand changement de mentalité chez nos partis? Car nos deux élus, par exemple, auraient bien pu, en effet, suivre une logique purement partisane et soutenir coûte que coûte les candidats de leurs camps respectifs sans tenir compte ni de leurs profils ni de leurs compétences.
C’est bien cette logique clanique de «soutenir son frère même s’il est dans le tort» qui a mené dans le passé des personnes à des fauteuils dont ils n’avaient ni l’étoffe ni les aptitudes.
Ne serait-ce pas là d’ailleurs l’essence des propos du Souverain quand, en août dernier, il exhortait les citoyens à s’impliquer sérieusement en allant aux urnes, et la classe politique à n’avoir pour seul souci que de servir les citoyens et l’intérêt général au-delà des calculs et des couleurs ?