Au Royaume
Elle trône à la tête de l’empire Coca Cola au Maroc
Le parcours de cette battante a commencé en 1987, le jour où elle a postulé pour une bourse américaine, pour laquelle elle n’avait pas le profil.
Johnson & Johnson, Procter & Gamble, Coca Cola, elle a fait ses armes
dans les temples mondiaux du marketing.
Elle se voit confier la direction générale de Coca Cola Maroc,
quelques mois à peine après les événements du 11-Septembre.

Le management à l’américaine ? On a l’impression que Samia Bouchareb, patronne de Coca Cola Export Corp., a baigné dedans depuis toujours. De fait, celle qui est aujourd’hui aux commandes de la filiale marocaine du géant d’Atlanta a fait toute sa carrière dans les multinationales, américaines de surcroît. Tout dans son cursus renvoie aux Etats-Unis, où elle a obtenu un MBA en 1990. C’est dire que les termes efficacité, objectifs, résultats, productivité et consorts sont les maîtres mots de son dictionnaire et de sa démarche. Mais, à y regarder de près, elle dégage un mélange d’indulgence, d’innocence voire de crédulité qui laisse perplexe. Illusion trompeuse ? Allez savoir… Le fait est qu’elle cultive une capacité d’étonnement et d’analyse surprenante. C’est certainement ce qui fait sa force, force qu’un interlocuteur non averti aura du mal à saisir d’emblée.
Recrutée par Johnson & Johnson avant même d’avoir finises études
Native de Casablanca, en 1965, Samia Bouchareb aime à clamer son appartenance à laclasse moyenne. Le père est cadre à la RAM, la maman a une fibred’entrepreneur en textile et couture. Un couple équilibré ensomme, et qui a choisi, pour leur donner les meilleures chances dans la vie,de n’avoir que deux enfants qui se trouvent être des filles.
De son enfance, Samia se rappelle avoir été une fille plutôttimide qui ne commencera à s’habituer à la prise de parole,aujourd’hui son apanage, que plus tard. Dans la famille, on ne lui dictepas le choix d’une discipline ou d’un cursus. Son père, dit-elle,aimait à la rassurer en lui disant : «Fais ce que tu aimes, maisassure-toi que tu l’aimes».
Après son Bac section économie, obtenu au lycée Lyautey,elle s’inscrit en prépa HEC Paris. Le tournant sera une bourse del’USAID pour un MBA. Une aubaine à laquelle elle n’étaitpourtant pas éligible, son profil ne répondant pas au critèrecentral : avoir une expérience professionnelle. Qu’à celane tienne, elle insiste si bien auprès de la dame qui en étaiten charge au consulat, que cette dernière finit par lui lâcher sanstrop y croire : «Si vous arrivez à passer la barrière desentretiens aux USA, je vous promets de vous aider. Mais il faut aller sur place».Il en fallait un peu plus pour faire reculer Samia. Le billet d’avion neposant pas de problème, puisque papa travaille à la RAM, il nelui faut que quelques jours pour convaincre sa famille et prendre un vol pourle pays de l’Oncle Sam où elle ébahit ses examinateurs. Deretour à Paris, la dame qui s’occupait des bourses a du mal à lacroire, au moment où elle lui fait part du résultat positif qu’ellea ramené de son intrépide déplacement de deux jours à l’université deRochester, à New York.
C’est d’ailleurs là qu’elle obtient son MBA en 1990,au bout d’un parcours si brillant que les recruteurs de Johnson & Johnsonlui proposent de travailler pour la multinationale alors qu’elle n’apas encore quitté le campus.
Elle conçoit le travail comme une activité ludique
Elle commence donc sa vie active au Etats-Unis et, l’année d’après,se retrouve expatriée à Paris au service du même employeur.Mais elle veut rentrer au pays et quittera son poste pour rejoindre Les industriesmarocaines modernes (IMM), filiale de Procter & Gamble au Maroc, en 1991.C’est là, se rappelle-t-elle, qu’elle a fait ses premièresarmes et vécu des situations qui lui ont permis de se faire une idéedes actions à entreprendre pour juguler une crise.
Exemple : l’arrivée du sachet Omo, qui avait alors bousculé lemarché et sérieusement perturbé IMM (producteur de la lessiveTi de), qui n’avait pas vu venir ce nouveau produit qui a su séduirele consommateur. Elle y reste près de trois années en tant quechef de produit, avant que son premier employeur ne la relance, les relations étantrestées très bonnes après son départ. Elle intègredonc la filiale marocaine de Johnson & Johson en tant que directrice marketingdes produits pour bébés. Nous sommes à la mi-1993.
Son arrivée à Coca Cola Maroc ne se fait pas de manièreclassique. En effet, en 1997, elle est approchée par le limonadier américainpour une mission de 12 à 18 mois comme chef de produit, avec la promessede se voir confier le poste de directeur marketing. Pendant six mois, elle faitses tournées dans les camions de distribution, visite les épicierset se familiarise avec le travail sur le terrain. Elle fait si bonne impressionque le poste promis lui échoit bien avant terme. Une petite ombre au tableau, à partirde 2001 : la période du boycott pour les produits de l’Amériquede Bush. C’est quelques mois après le 11-Septembre, et plus précisémenten janvier 2002, qu’on lui confie la direction générale.Une belle preuve de confiance en ces temps troublés.
Qu’est-ce qui a permis à Samia Bouchareb de faire une carrièreaussi fulgurante ? Elle n’en sait rien, dit-elle, amusée. Une choseest sûre, elle aime ce qu’elle fait et avoue tirer beaucoup de plaisir(et de nombreux moments de rire même) de son travail.
