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Maroc : Des agriculteurs réussissent à atteindre des rendements de 70 q/h grà¢ce à l’agrégation
180 céréaliculteurs regroupés dans le groupement Tanmia Filahia sur une superficie de 3 800 hectares. Tanmia Filahia, un groupement d’intérêt économique créé par Charaf-Fertima et les Moulins du Maghreb. La récolte prévisionnelle est estimée à au moins 170 000 quintaux contre 60 000 l’année passée.
L’expérience de l’agrégation, enclenchée depuis la précédente campagne, commence à donner des résultats palpables. Et cela ne concerne pas seulement de grandes institutions comme l’Office de commercialisation et d’exportation (OCE) ou l’Agence de développement agricole (ADA) qui accompagne le mouvement. Des particuliers y ont trouvé leur compte tout comme les agriculteurs qu’ils ont recrutés pour participer à leurs projets devenus réalité. Parmi les privés qui ont réussi à faire converger leurs intérêts avec ceux des exploitants agricoles, il y a Les moulins du Maghreb et Charaf Fertima. Le groupement d’intérêt économique (GIE) qu’ils ont créé et baptisé Tanmia Filahia dans la région de Berrechid fête aujourd’hui sa deuxième campagne agricole. L’année dernière déjà, ce sont 2 700 h, réunissant 102 agrégés, qui ont été cultivés. Le GIE finançant la campagne et garantissant l’achat du produit de la campagne. La campagne passée, avec un rendement moyen de 35 q/h, ce sont 60 000 q qui ont atterri dans les silos des moulins. Cette année, l’expérience est passée à la vitesse supérieure puisque le nombre d’agrégés est passé à 180 exploitants agricoles pour une superficie de 3 800 h et une récolte estimée à au moins 170 000 q, sans compter le blé dont la qualité a été détériorée par la pluie et la grêle. Le rendement moyen atteint 50 q/h et dépasse même 70 q/h dans certaines exploitations.
Le coût de revient a augmenté mais le rendement améliore le profit
Les agriculteurs ne tarissent pas d’éloges sur la manière dont s’est déroulée la campagne. Même si certains d’entre eux, un peu moins de 30%, ont financé eux-mêmes leur campagne par des crédits contractés auprès du Crédit Agricole, ils estiment y avoir gagné.
Saïd Beggar, agriculteur à Berrechid, a réussi un des meilleurs rendements. La campagne passée, il ne s’est engagé dans l’opération que sur 30 h, mais est vite passé à 50. C’est le GIE qui l’a accompagné à tous les niveaux, de la préparation de la terre au suivi de l’itinéraire technique, en passant par l’achat de la semence certifiée et des engrais. Bien entendu, il a vite fait ses calculs et ne le cache pas : «Lorsque je travaillais en comptant sur mes maigres moyens, l’hectare me revenait à 2 500 DH. Aujourd’hui, le coût de revient est passé entre 3 500 et 4 000 DH. Mais je me retrouve au niveau du rendement et de la qualité de ma récolte».
Bentangi Mohamed, également de Berrechid, participe pour la première fois à l’expérience, avec 25 h. Il a, bien évidemment, fait le même constat mais, pour lui, il se retrouve aussi sur deux niveaux qu’il juge convaincants. «Avec l’accompagnement des techniciens du GIE, dit-il non seulement j’ai appris à mieux travailler mais, au cours de leurs visites, chaque évolution est observée et on peut rattraper les erreurs, les corriger et doser les solutions, à tout moment. Sur le plan de la commercialisation, je vend ma récolte cette année entre 260 DH et 280 DH le quintal, selon la qualité. L’année dernière, j’ai cédé ma moisson à des intermédiaires à 230 DH». Le compte est vite fait.
D’autres agriculteurs rencontrés aux Moulins de Berrechid alors qu’ils livraient leur blé se félicitent d’avoir pris le train en marche. C’est le cas de Hadj Ahmed Idrissi, lui aussi agriculteur à Berrechid. Lui est satisfait du délai de paiement qui, à l’entendre, ne dépasse pas une semaine, après avoir fait peser sa récolte. «Même si je n’ai pas mis un centime dans l’opération, en juin je dois régler certaines dettes ou l’aliment du bétail et je suis bien content de recevoir mon argent pour affronter les dépenses courantes de ma famille», explique-t-il.
La grêle et la pluie ont détérioré la qualité dans certains périmètres
Ceci dit, les agriculteurs qui sont contents des dernières campagnes pluvieuses ont souffert des récentes et inhabituelles perturbations climatiques de fin mai et début juin. La pluie et la grêle ont fait quelques dégâts dans les champs. Il y a d’abord des pertes mais surtout les débuts de germination qui rendent le blé impropre à la consommation humaine -ce qui a fait baisser la récolte potentielle. Le ministère de l’agriculture a d’ailleurs instauré, pour cette campagne, des analyses, pour déterminer le degré de germination. Reda Labazi, directeur général des Moulins de Berrechid, explique : «Nous avons du mal à expliquer à certains agriculteurs que la germination ne se voit pas toujours à l’œil nu. Cela leur fait des pertes mais nous n’y pouvons rien». Un autre problème suscite la réaction du directeur des moulins : l’impossibilité de commencer à emmagasiner le blé avant le début de juin car plus la moisson accuse un retard dans la moisson et les conditions de stockage aléatoires, plus la déperdition de la qualité se fait sentir.
Quoi qu’il en soit, le GIE se félicite des résultats de l’opération «agrégation». Même si quelques agriculteurs n’ont pas totalement joué le jeu. Deux d’entre eux ont bien bénéficié du financement mais sont allés vendre leur récolte ailleurs. Mais, explique Chakib Laâlaj, «d’abord, ils ont compris que ce jeu-là n’est pas dans leur intérêt et ont promis de rentrer dans les rangs. Ensuite, dans toute entreprise, surtout à ses débuts, il y a toujours des brebis galeuses et cela, loin de nous décourager, nous incite à aller de l’avant».
