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Les avocats MRE se serrent les coudes pour mieux servir la diaspora

Pas moins de 84 avocats MRE ont participé au forum organisé par le ministère délégué chargé des MRE et l’Association des barreaux du Maroc. L’édition 2018 sera dédiée à l’élection d’un bureau de coordination des avocats MRE. Ils réclament le droit de plaider au Maroc et insistent sur la préservation des droits des MRE.

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Deuxieme edition du Forum des Avocats MRE a Agadir

Un pas de plus a été franchi pour la création d’un groupement des avocats marocains résidents à l’étranger. Organisée à Agadir les 24 et 25 novembre par le ministère délégué chargé des MRE et l’Association des barreaux du Maroc, la 2e édition du Forum des avocats MRE a réuni pas moins de 84 d’entre eux, en présence de leurs homologues marocains. Droit de la famille, droit international, droit des affaires, droit de l’immigration, droit du travail…. Quasiment toutes les spécialités du métier sont représentées dans ce réseau. «Venus de 20 pays d’accueil, les avocats MRE maîtrisent les rouages de 20 systèmes juridiques et judiciaires», a précisé le ministre délégué chargé des MRE et des affaires de la migration, Abdelkrim Benatiq. France, pays du Benelux, Allemagne, Espagne, Etats-Unis, Canada, Algérie, Tunisie, Qatar, Sénégal… Autant de pays d’accueil aux systèmes et aux traditions juridiques variés.

Fait important à noter, la plupart des invités sont des jeunes de la 3e et la 4e génération. Né en 1992 aux Pays-Bas et avocat au barreau de Horn, Issam Moustaine est le plus jeune d’entre eux. Sa consœur du barreau d’Oran, Me Amina Belarbi, est la doyenne de cette communauté qui a vu le jour lors de la 1er édition du forum, tenue à Rabat en avril 2016.

Si les deux premières éditions du forum ont permis de créer un réseau, d’identifier les problématiques juridiques et judiciaires brûlantes des MRE et d’entamer la réflexion sur les détails de la forme et de l’organisation du futur groupement d’avocats MRE, ce n’est qu’à partir de la 3e édition que ce dernier verra le jour. A en croire M. Benatiq, d’autres forums de MRE dédiés à d’autres professions (médecins, ingénieurs, chercheurs et experts) verront le jour. En clair, l’idée est de rassembler les compétences marocaines dans le monde et les associer aux différents chantiers de leur pays d’origine. Il s’agit également et surtout de faire de la diaspora marocaine un outil de softpower.

Les préoccupations des MRE dans les pays d’accueil mises en exergue

Protection des droits et des intérêts des catégories vulnérables des MRE, mécanismes d’assistance juridique et judiciaire dans les pays d’accueil, métier d’avocats et globalisation… Ce sont là les thématiques des trois panels programmés par les organisateurs. L’objectif était de dresser l’état des lieux de chacun de ces axes et de soumettre des recommandations au ministère de tutelle.

Une quinzaine d’avocats MRE se sont donc prêtés à cet exercice. Détail qui mérite d’être souligné, plusieurs d’entre eux se sont efforcés d’intégrer dans leurs interventions des passages en darija ou en arabe dialectal, histoire de prouver leur attachement à leur pays d’origine.

Au panel 1, plusieurs phénomènes et problématiques touchant les catégories vulnérables ont été évoqués par six avocats marocains résidant en Europe. Dans le cas de la France, Me Nisrine Zahoud a évoqué l’impossibilité pour les MRE retraités en France de bénéficier de la couverture sociale au Maroc ou l’obligation de ne pas résider à l’étranger plus de 181 jours sous peine de perdre certaines pensions complémentaires. En matière pénale, la discrimination est l’autre phénomène dont souffrent les catégories vulnérables à en croire Me Abdelkrim Grini.

En Espagne, les mineurs non accompagnés demeurent la catégorie la plus vulnérable parmi les MRE, d’après Me Saleha Aarabe. Elle souffre de la problématique de la définition de l’intérêt supérieur de l’enfant et le recours récurrent à l’expulsion et la lourdeur de la procédure d’octroi de la résidence.

En Belgique et d’autres pays, les avocats MRE pointent du doigt l’impossibilité pour certaines catégories vulnérables de bénéficier du droit au regroupement familial, ce qui est contraire à la législation européenne des droits humains. «Les Marocains en situation de vulnérabilité sont doublement pénalisés. A titre d’exemple, un handicapé incapable de travailler se verra refuser le regroupement familial en cas de mariage vu que son revenu est jugé insuffisant», déplore Me Ahmed L’Hedim du barreau de Bruxelles. Autre problématique dans tous les pays d’accueil, celle de la non-reconnaissance des jugements entre le Maroc et les pays d’accueil, en l’occurrence dans ce qui a trait aux affaires du code de la famille et de la kafala.

Une banque de données pour l’échange d’expérience entre avocats MRE et ceux du Maroc

Pour résoudre ces problématiques, les intervenants ont recommandé une série de mesures au ministère de la justice. Il s’agit d’amender l’accord de sécurité sociale entre le Maroc et la France pour que les retraités marocains puissent bénéficier de tous les droits, même s’ils choisissent de se réinstaller au Maroc. Selon eux, les dispositions de la convention maroco-belge sont à dupliquer dans toutes les conventions liant le Royaume aux pays d’accueil. Autre recommandation : la création d’une banque de données pour permettre aux avocats MRE et leurs homologues exerçant au Maroc de partager les expériences et les cas de jurisprudence. Pour ce qui des autres problématiques précitées, les participants ont proposé d’approfondir les échanges entre avocats MRE et ceux du Maroc à l’aune du droit comparé.

Les deux autres panels ont été également riches en échanges et ont apporté leurs lots de recommandations. Pour une meilleure assistance juridique et judiciaire aux MRE dans les pays d’accueil, les avocats MRE ont exhorté leurs homologues exerçants au Maroc et les pouvoirs publics de permettre à n’importe quel avocat MRE de plaider au Maroc sans conditions ou accord préalable en l’absence d’une convention.

Ils ont également recommandé la nécessité de mettre en place d’autres conventions bilatérales pour préserver les droits et les intérêts des MRE.

En outre, il a été souligné le rôle que doivent jouer les avocats MRE dans l’assistance à leurs compatriotes à l’étranger et la nécessité de créer des associations dans ce sens. Enfin, les participants ont souligné la nécessité de réformer le corpus légal et académique du métier d’avocat à même de prendre en considération les nouvelles donnes imposées par la globalisation et la révolution digitale.