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Affaires

Année judiciaire record pour la Cour de cassation

24 129 affaires jugées durant les 10 premiers mois de l’année 2013/2014 contre une moyenne annuelle ne dépassant pas 10 000. Plus de 57% des affaires passent par la Chambre pénale. Les droits de la défense renforcés en matière fiscale.

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Annee judiciaire 2014 08 11

En dépit de la bataille politique que mène le ministère de la justice avec ses auxiliaires, les juridictions continuent de tourner à plein régime. Ainsi, les six Chambres que comprend la Cour de cassation ont étudié 29 442 affaires durant les 10 premiers mois de l’année judiciaire 2013/2014 qui se termine à la fin du mois courant. C’est la Chambre pénale qui se taille la part du lion avec 16 901 dossiers, soit 57,4% du total. Ce qui a contraint la Cour à créer davantage de sections à la Chambre pénale. Mieux, un membre de la Cour parle d’un record au niveau du traitement des affaires. Ainsi, 24 129 dossiers ont été étudiés en moins d’une année, soit près de 82% des affaires étudiées. Le chiffre est impressionnant puisque la moyenne des dossiers devant être traités ne dépasse pas 10000 par an.
Les juridictions inférieures connaissent la même tendance, à savoir la prédominance du pénal. 68% des affaires jugées en appel concernent le pénal, avec presque la même proportion pour la première instance. Quant aux tribunaux et Cours d’appel de commerce, ils ont statué sur 153000 affaires.
La juridiction présidée par Mustapha Farès a livré plusieurs arrêts de principe : procédure de redressement fiscal, abus de procédures, erreur judiciaire… Elle renforce notamment la responsabilité de l’Etat en matière de mines antipersonnel ou de droit d’accès aux services de soins. Des jurisprudences également qui protègent les droits de la défense au nom du débat contradictoire.
L’une des décisions les plus marquantes est celle relative à l’erreur judiciaire. Outre qu’elle concerne un point de droit découlant de la Constitution du 29 juillet 2011, elle porte sur des faits pour le moins rocambolesques.

L’agence judiciaire de l’Etat déboutée dans une affaire d’erreur judiciaire

Arrêté pendant plus de 6 années pour constitution de bande criminelle, vol à main armée et obstruction à la circulation d’un train, le requérant est en fin de compte reconnu innocent par arrêt de la Chambre criminelle d’appel de Fès. Invoquant l’erreur judiciaire, la victime intente un recours en réparation devant le tribunal administratif. L’agent judiciaire du Royaume soulève l’incompétence matérielle du juge administratif. Il sera débouté par la Cour de cassation qui reconnaît la compétence des juridictions administratives. «Il s’agit là d’une décision rendue par la Chambre administrative de la Haute juridiction qui, à notre connaissance, fait application pour la première fois de l’article 122 de la Constitution. Celui-ci dispose que les dommages causés par une erreur judiciaire ouvrent droit à réparation à la charge de l’Etat», commente Mohamed Amine Benabdellah, professeur à l’Université Mohammed V de Rabat et membre du Conseil constitutionnel. Cette reconnaissance solennelle de la responsabilité de l’Etat dans l’exercice de son pouvoir régalien révèle «la volonté du constituant de faire prévaloir l’idée de justice sur toute autre considération», écrit Michel Rousset, professeur de l’Université de Grenoble, dans un commentaire de l’arrêt qui date du 12 février 2013.

La responsabilité de l’Etat a été également maintenue dans le cadre des mines antipersonnel dans les accidents dus à des négligences du Conseil communal de Assa-Zag qui n’a pas rempli ses obligations de prévention. Une négligence qui a coûté la vie à un enfant de 5 ans, qui s’est noyé dans les égouts.

Le contribuable a droit à être informé des décisions le concernant

Il y a également l’erreur médicale dans les hôpitaux. Ce n’est pas le personnel qui est mis en cause mais ses services défaillants… La Cour de cassation s’est prononcée dans une affaire liée à la vaccination d’un enfant qui lui en a causé la surdité. La haute juridiction a estimé que l’Etat doit assumer le risque et «donne droit à indemnisation de la victime au nom de la solidarité sociale».  
Les droits de la défense ont également été renforcés, notamment en matière fiscale. En effet, pour faire valoir ses droits en tant que contribuable, l’on dispose de deux voies de recours. Outre la voie judiciaire, il y a l’arbitrage. Celui-ci ne concerne que les trois grands impôts: la TVA, l’IS et l’IR. Aussi bien la Commission locale de taxation que la Commission nationale sont tenues d’informer et de notifier leurs décisions au contribuable. Si ces obligations ne sont pas respectées, la Cour considère cette faute comme un «facteur d’annulation du redressement». Elle invoque ainsi le vice de forme portant atteinte au droit de la défense. C’est dans ce même esprit qu’un expert judiciaire ne peut se contenter de notifier aux parties la tenue d’une expertise par téléphone. L’écrit est obligatoire pour se préserver contre d’éventuelles contestations de la procédure d’expertise. Là aussi, la jurisprudence se montre pointilleuse sur la forme.

Com’ese

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