Affaires
2009, une année à oublier, 2010, celle des incertitudes
L’évolution de la production de l’industrie manufacturière est encore révélatrice de l’atonie qui a prévalu durant les deux premiers semestres.
Le tourisme, l’immobilier et le textile ont souffert, les technologies de l’information et l’industrie alimentaire s’en sortent mieux.
Les patrons se gardent de faire des prévisions pour 2010.
N’eut été une très bonne campagne céréalière, 2009 serait sans doute une année à oublier très rapidement, tant le secteur non agricole a souffert de la crise que les décideurs politiques avaient pourtant commencé par minimiser, pour ne pas dire nier, dès l’apparition des premiers signes négatifs au cours du premier trimestre, peut-être pour éviter une psychose. Mais les faits sont têtus, quasiment tous les secteurs ont été plus ou moins touchés,même s’il y a eu, en général, plus de peur que de mal.Et ce n’est certainement pas pour du faux-semblant qu’un comité de veille a été constitué et des plans d’urgence mis en oeuvre. Le coup de blues est d’abord reflété par l’évolution des différents agrégats macroéconomiques. La distribution du crédit a nettement ralenti par rapport aux années précédentes, tant pour le financement de l’immobilier et de l’équipement que pour la trésorerie et la consommation ; les exportations ont dégringolé de 33,6% à fin septembre par rapport à la même période de 2008 ; les importations ont cédé 19,7% ; les investissements privés et prêts privés étrangers se sont dépréciés de 35,9%et les recettes voyages de 8,8%.
Les pires moments ont été vécus pendant la première moitié de l’année
Au niveau sectoriel, l’évolution de la production de l’industrie manufacturière est encore révélatrice de l’atonie qui a prévalu durant les deux premiers semestres. En dehors des industries alimentaires, toutes les autres activités (tabac, textile, cuir, bois, carton et produits de l’édition) ont fléchi.Les mines et l’électricité ne sont pas épargnées. Les chiffres du troisième trimestre ne sont pas encore communiqués par le Haut commissariat au plan (HCP) mais il est fort probable qu’il n’y a pas eu un infléchissement notable de la courbe compte tenu de la léthargie qui prévaut habituellement pendant Ramadan qui s’est étalé d’août à septembre. Bref, pour un large pan du tissu économique, les préoccupations étaient davantage à la limitation des dégâts. Qui de mieux placé que les patrons des entreprises de la place pour raconter les difficultés et doutes qui ont hanté leurs nuits au cours des 10 premiers mois ? Un mini-sondage effectué par La Vie éco auprès de 36 d’entre eux confirme quasiment tout ce que les chiffres ont jusque-là révélé. Selon la majorité, les nuages n’ont commencé à se dissiper qu’en octobre et tous invoquent les effets de la crise internationale. Les pires moments ont été vécus pendant la première moitié de l’année. Les commentaires sont à l’avenant. Abdeljali Lahlou, DG de Siera, met l’accent «sur une année morose »; KarimTazi, administrateur de Richbond, avoue que, jusqu’en mai, son entreprise a «frôlé la catastrophe» ; Samir Benmakhlouf, président de Century 21, souligne que le secteur de «l’immobilier a pâti d’un ralentissement» ; Amine Benkirane, PDG de Kitéa, évoque «un premier semestre médiocre ». Quant aux ventes de ciment, elles ont été «très atones jusqu’en juin», selon Jean Marie- Schmitz, PDG de Lafarge. Essaid Bellal, DG de Diorh (recrutement), et Jamal Belahrach, celui de Manpower (travail temporaire et recrutement), ont également constaté que les entreprises ont été très peu demandeuses en ressources humaines, particulièrement durant la première moitié de l’année.Autre preuve de l’ambiance peu conviviale, Jamal Krim, DG de Réco Act, société spécialisée dans le recouvrement, annonce une hausse de 20%de son activité. C’est dire que les problèmes de trésorerie n’ont pas manqué. Pourtant, ce n’est pas seulement ce genre d’entreprises qui n’ont pas subi la crise. Paradoxalement, les distributeurs de matériel informatique et les sociétés de services du même secteur disent ne pas avoir connu les mêmes avatars que d’autres professions, même si «le démarrage a été quelque peu laborieux», comme l’indique le patron d’IBM Maroc, Abdallah Rachidi Alaoui. Si l’on rapproche les indicateurs des propos des patrons, l’industrie alimentaire, surtout celle tournée vers le marché intérieur, s’en est bien tirée. Naturellement, la contraction de la demande étrangère des suites de la baisse du pouvoir d’achat a bridé la croissance,mais il est difficile pour les opérateurs de ce secteur de faire la bouche tant l’environnement a été très peu favorable.La grande distribution est dans la même veine. Ce n’est que durant le mois d’octobre que des signes de reprise ont commencé à percer. Beaucoup de patrons ont ressenti cette petite embellie. Mais presque tous refusent de céder à un optimisme béat. Quand on les interroge sur leurs prévisions 2010, la majorité préconisent la prudence, invoquant, pêle-mêle, le manque de visibilité, l’accessibilité au crédit , les contraintes exogènes, la rareté du foncier ou l’évolution du dirham par rapport au dollar ou à l’euro. Les plus téméraires avancent que l’activité économique reprendra réellement au second semestre 2010. Le grand risque pour ces opérateurs c’est pourtant de garder une posture attentiste. C’est en effet dans des périodes d’incertitudes qu’il faut renforcer les bases de leurs entreprises pour pouvoir rester compétitifs sur les marchés extérieur et intérieur.
36 patrons parlent de 2009 et livrent leurs pronostics de 2010
MOHAMED HASSAN BENSALEH :
Année normale sur le plan économique, difficile sur le plan financier
KARIM TAZI :
2009, finalement en croissance,mais, s’il ne pleut pas, 2010 sera pire
KHALIDA AZBANE :
10 % de croissance pour 2009 et l’année 2010 se présente bien
AZIZ KADIRI :
10 % de baisse dans l’emballage et pas de visibilité pour 2010
MUSTAPHA SAJID :
Le textile n’est pas encore sorti de la crise
JAMAL KRIM :
La crise a boosté l’activité de recouvrement
MAMOUN MARRAKCHI :
Des frémissements de reprise, 2010 sera une bonne année
MARC THÉPOT :
Rattrapage au cours du second semestre 2009, incertitudes sur 2010
SALAH EDDINE AYOUBI :
La demande s’est essoufflée durant les deux ou trois derniers mois
AMINE BERRADA :
La croissance sur le marché local reprendra en 2010
MOHAMED BERRADA :
Notre activité s’est maintenue sur le marché local et a crû à l’export
LUCIEN LEUWENKROON :
Une bonne croissance pour l’exercice à venir
MOHAMED HOUBACHI :
Une croissance à un seul chiffre, pour la première fois depuis des années !
RIAD LAISSAOUI :
La conjoncture difficile ne nous a pas empêché de croître
ABDELJALIL LAHLOU :
Le premier semestre a été morose
SAMIR BENMAKHLOUF :
L’immobilier suspendu aux nouveaux plans d’aménagement des villes
M’HAMED AKDIM :
Un recul au début, un rattrapage d’ici la fin de l’année
AMINE BENKIRANE :
Les six premiers mois de 2010 risquent fort d’être difficiles
NOUREDDINE ANACLETO :
Le marché des TIC connaît un grand dynamisme
CHAKIB BEN EL KHADIR :
Une baisse d’activité en 2009 et un maintien en 2010
KARIM BELMÂACHI :
L’année 2010 sera difficile, il faut se préparer pour la reprise en 2011
JEAN-MARIE SCHMITZ :
Légère croissance en 2009, même scénario pour 2010
FOUAD BENZAKOUR :
2010 sera difficile pour le secteur des matériaux de construction
RACHID SEFRIOUI :
1er semestre 2009 calme, forte croissance attendue pour 2010
MOHAMED AMINE BOUABID :
Dans la conjoncture actuelle, difficile de prédire une reprise en 2010
MEHDI KETTANI :
Un cru satisfaisant sans être exceptionnel
DRISS TRAKI :
Année conforme aux prévisions et 2010 ne devrait pas présenter de problèmes
GHAZOUANI JNINI :
Le transport de voyageurs s’en sort mieux que l’activité marchandises
ABDALLAH RACHIDI ALAOUI :
2010 sera difficile pour le secteur des solutions informatiques
ESSAID BELLAL :
Le recrutement évolue en dents de scie, mais 2010 sera une bonne année
JAMAL BELAHRECH :
L’activité intérim a été stable, le recrutement a chuté
MOHAMED TALAL :
On s’attend à une légère reprise en 2010
DAVID TOLEDANO :
Nous sommes inquiets pour 2010
BRAHIM TAOUSS :
La reprise sera au rendez-vous à partir du 2e semestre 2010
YOUSSEF BENKIRANE :
Le redressement des économies occidentales devrait restaurer la confiance à la Bourse de Casablanca
JALIL BENABBÈS TAARJI :
Marrakech est en baisse, on s’en sort mieux à Agadir